Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/476

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l’on refrénait sa brutale indépendance ; mais cela, justement, rendait plus certain le péril. Si Denise abandonnait Édouard, il se réfugierait aussi dans l’état ecclésiastique. La protection du comte guiderait-elle également le fils et le neveu dans la même carrière ? Certes non. Omer serait probablement sacrifié.

Or, la malignité découverte en Denise, la cupidité de l’oncle Augustin, si dévoué en apparence, si fin en son indulgence lasse ; l’esprit sévère d’Émile, la haine de Delphine contre les gens de pensée libre, l’humanité toute hideuse révélée brusquement, accroissaient le dégoût de l’étudiant pour le monde. Plus que jamais l’Église et ses ambitions le séduisirent. À tous ces méchants, à ces pécheurs, il imposerait la Loi Divine qui pardonne et qui châtie, qui retranche et qui dispense. Que son âme était meilleure ! Comme elle saurait prescrire aux fidèles l’exercice de la vertu ! Ah ! comme ils l’avaient trompé sur lui-même au tribunal de la pénitence, les Pères qui l’avaient flétri d’épithètes outrageantes !

Auprès des autres, il était un saint, lui, un saint comme le bisaïeul, comme sa mère, comme les Lyrisse. Les peccadilles de sa luxure ? Saint Augustin ne les avait-il point pratiquées, avant de devenir un exemple de sagesse et de pieuse intelligence ? Le Père Anselme parlait en rigoriste absurde.

Au contraire, l’outrecuidance du cardinal Castiglioni envers les invités du comte et les fidèles du Père Ronsin parut logique. Voilà de quelle hauteur il seyait de tenir les rênes, sous quoi l’attelage obéit et trotte. Aussi bien fallait-il laisser les brutes dans la boue de Canossa, comme l’empereur allemand, devant la porte close de la vertu spirituelle. Parce que le monde était satanique ou bête, il importait de le vaincre et régir. Donc, il convenait d’atteindre à la domination. « Il y a trop de hontes en chacun.