Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/85

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crites et secrètes de la Maçonnerie… Que faites-vous de son enfant ?…

― Bernard Héricourt était un fils de la Révolution. Il est mort pour les Droits de l’Homme… c’est au même culte qu’Omer sacrifiera, s’il m’écoute.

Le vieil homme, debout, proférait les mots distinctement. Il assurait sa canne devant lui. Ses mains s’y appuyèrent. Il regarda les yeux ronds de la tante. Il se redressait en son habit vert qui tombait de ses hautes épaules jusqu’aux guêtres. Il épousseta son jabot moucheté de tabac. Il releva une tête large, blafarde et fière, entre les flocons de sa chevelure. Au coin de sa narine, la verrue était plus rouge.

― Vous me demandez des comptes, madame, ce me semble… Et sa grosse lèvre inférieure tremblait.

― Praxi-Blassans est le tuteur ; je le représente ici ; je représente mon frère mort ; et je vous demande ce que vous faites de son enfant.

― J’en fais un être libre…

― Un jacobin par l’esprit, c’est-à-dire un homme impie, un homme de sang et de crimes ; et un pauvre hère, par la bourse… Voilà ce que je sais de votre éducation…

De sa voix lamentable, elle gémit cela, sans arrêter les caresses dont elle flattait les boucles d’Omer. Même elle rajustait, en la tirant, la petite veste ; elle remontait machinalement, par le pont, la culotte rayée. Interdit, Omer ne bougea point. Le besoin de pleurer l’étouffa. En même temps, il s’enorgueillissait de conquérir cette importance que deux personnes redoutables se disputaient ainsi, pour lui, la haine aux lèvres.

― En effet, ― reprit le parrain, ― vous êtes la tante de l’orphelin : je vous dois de m’expliquer…

― Plaise à Dieu !… j’aimerais apprendre vos raisons…

Elle n’acheva point, mais se baissa pour ramasser