Page:Adam - Le Serpent noir (1905).djvu/118

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ogival de petite fille. Ses levres et son rire tremblaient. Les osselets de ses mains blafardes s’agriffaient à mon manteau de Berlin par un geste de détresse. En ses yeux presque hagards c’était l’effarement de se comprendre si faible, alors que madame Hélène et moi demeurions à peu pres fermes, parmi les claquements de nos habits.

Certes, il en était à s’apercevoir que sa maladie et sa mauvaise hygiène de savant, tantôt reclus avec les miasmes, tantôt exténué par des courses a bicyclette chez les malades lointains, avaient profondément miné sa vigueur normale. Je constatai qu’il essaya de lire sur ma physionomie. Je ne crus pas devoir lui cacher mon pronostic défavorable qu’une grimace de pitié contirma :

— Voilà — criai-je a notre amie — un marin qui n`a pas les jambes tres solides ! Nous autres gens de terre...

vociférations de l’air m’interrompirent. Nous nous retournâmes ensemble.

Devant nous, sous_Ies nuages opaques soulignés d’argent par le soleil qu`ils masquaient presque, la mer, en bonds immenses et furibonds, accourait dans l’arc abrupt de la baie. Elle y poussait les lignes de ses vagues galopantes qui sleffondraient en cascades, se reformaient en conques d’eau glauques et diaphanes, ressurgissaient, s’empanachaient d’écumes, sautaient les cailloux monstrueux, comblaient les trous des récifs envahis, s`épanohaient par les brèches, escaladaient les massifs de pierres vertes, redescendaient en torrents de _mousse, en rivières bruyantes, pour se rallier, mugir, s’unir et grandir, peuple innombrable de fantômes fluides qui, depuis