Page:Adam - Le Serpent noir (1905).djvu/341

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336 LE sunrnivr Nom bousculait entre les baraques ou- glapissaient les vendeuses de babioles. Une poussiere rousse noyait la rue du camp forain. Les cymbales vibraient. L’em— pereur romain hurlait, sur l’estrade, devant ses vestales en maillots de coton rose. Déciderait—il au spectacle de la tragédie ces imaginations en travail sous la tiare noire de, Pontivy, sous la capuche de percale lorientaise, sous les diademes et les brides recercelées de Pont-Aven? Pierrots noirs à boutons d`argent, les Bigoudins s’extasiaient avec les garçons de Pontivy _qui ont des vestes de drap blanc, souta— chées de velours. Pour eux tournaient en grinçant les grandes roues polychromes des loteries. Pour eux éclatait le pétard ûxé en haut de la perche, quand un colosse avait d'un coup de maillet furieux, fait bondir, jusqu’à la pointe, le poids de métal. Les sons des cloches pieuses s’unissaient aux boniments des som- nambules, aux roulements du tambour. Des rustres piétinaient en mâchant des croûtons de pain bis. Une odeur de fauves, d’encens et de friture animait l’air barbare. —- Remarquez encore — disait madame Hélène - ‘comme les anciennes mœurs persistent merveilleuse- ment sur cette terre d’élection. Ne se croirait-on pas au temps ou la fête de l’Asne et son carnaval se déployaient dans l’église, avec ses fous, ses ribaudes, ses diables et ses personnes bibliques, pour se termi- ner par la représentation d'un mystere et d’une farce, sous le porche lithurgique, la nef servant de coulisses- aux comédiens d’occasion‘?... Voici la même chose, Ces baraques se sont dressées contre le mur de l’abside; et la foule mêle au mysticisme de sa piété ertaine le contentement de ses instincts assouvis.