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LE SERPENT NOIR

nous ôtera l'ignorance, c'est-à-dire le mal, la douleur et la crainte de la mort. La mort, sommeil transitoire, promesse de résurrection sous des formes neuves (microbes végétaux et animaux), afin que l'on se perpétue dans la vie éternelle... Ainsi soit-il!

J'avais trop souvent our les faux mystiques de ma génération donner dans ce travers de cabaret et de salon théosophique, pour préter beaucoup d'attention à de telles paroles. Il m'amusait que le docteur s'évertuât contre mon scepticisme, au milieu de la cohue fleurant le drap mouillé. Sur le seuil de l'église nous nous heurtâmes à la multitude compacte des pèlerins qui chantonnaient timidement les can- tiques psalmodiés, dans le choeur, par les voix claires et tendres des vierges. C'était un spectacle des vieux temps. La houle d'un peuple étrange, peut-être ressuscité, battait les colonnes de cette basilique trop neuve pour les hennins et les coiffes qui formaient l'écume de l'élément humain aux flots innombrables. Fluide, il coulait partout, se tassait dans tous les angles, s'agenouillait sur toutes les dalles s'ados- sait à toutes les grilles s'étalait, sur toutes les marches s'accroupissait dans tous les coins. La mer monte aussi dans les creux de la côte rocheuse. Là-bas flambaient les buissons de cierges. Les veilleuses, dans leurs godets écarlates, clignotaient au centre des couronnes planantes. A l'ombre des cornettes, 'mille faces sexagénaires et résignées, mille figures innocentes et timides marmonnaient perpétuellement, les yeux aux saints des niches. Des souliers à clous grinçaient. Venues de la côte, maintes paroisses assiégeaintles confessionnaux. Pour absoudre sans cesse, les prêtres se relayaient, las et hâves, malgré leurs