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Page:Adam - Le Serpent noir (1905).djvu/51

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46 ms ssnvsmr mom — Ah! ah! tu l’aimes enfin ma Bretagne, toute ma Bretagne du moyen âge, toute ma Bretagne souffrante et croyante, toute ma sainte Bretagne... Vois-tu comme le vieiu: temps ressuscite ici? De fait, nous foulions aux pieds des familles qui s`arrangeaient sur les marches du chœur pour y passer la nuit, conformément au vœu. A croppetons, · des mères s’installaient en berçant les pleurs et les cris de leurs nourrissons effrayés par l`eclat des lumières et les rumeurs de la foule toujours plus A dense. Maintenant elle comblait les chapelles laté- rales, s’accoudait aux autels, s’assoupissait sur les prie-dieu, et s‘accotait contre le catafalque remise dans une encoignnre. Les malades geignaient dans les bras de leurs parents accroupis, silencieux. Les bambins jouaient, en sourdine, à se poursuivre autour dun pilier, sous le saint évangéliste qui levait deux doigts en plâtre. Mais leurs rires, brusqpement, s’évadaient de leurs bouches glaireuses, et brisaient l`harmonie du cantique psalmodié par une équipe de servantes très sages qui gardaient leurs missels ouverts dans leurs mains rouges. _M‘“° Goulven répétait parfois un vers de leur litanie, puis achevait la strophe avec elles. Alors elle ne diflérait pas beaucoup des choristes, tant sa physionomie était .passive et résîgnée. Son teint pâle, ses mains fines et gantées, sa chevelure terne nouée sous le chapeau brun, ne suffisaient pas à la rendre distincte. Je l’ima- ginai sous la cornette à brides roides, sous le petit châle amarante, plissé au bas de la nuque, et dans la bure noire à biais de velours. Comment cette pauvre femme timide aiderait-elle le génie de son époux à vaincre l’hostilité du sort et l’inditl`érencedes hommes ?