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LE SERPENT NOIR

rieurement inventé par un certain docteur Goulven. C’était une perte évaluée à plusieurs centaines de mille francs. Ce M. Guichardot fut appelé devant le Conseil d’administration. Il devait tout d’abord se justifier, puis dire les moyens de réparer sa bévue. Mandataire de plusieurs parents qui ont aussi des intérêts dans cette entreprise, j’assistai à la séance. Autour d’un tapis vert, et confortablement assis dans nos fauteuils de cuir, nous nous trouvâmes là, vingt messieurs décorés, affables, dissimulant, sous les ambages de la courtoisie la meilleure, un vif sentiment de nos droits, de nos espérances, de nos mérites.

Homme délicat et fort satisfait d’une petite moustache en crocs, d’une main fine que chargeaient des bagues féminines, le président exprima d’abord ses regrets d’un pareil désastre. Il rappela que la majorité du conseil, par l’intermédiaire de la Commission des Comptes, avait, en 1899, sévèrement interdit de consentir toute avance aux chercheurs de panacées sauf en cas de certaines garanties positives. Aussi n’avait-il pas dépendu des administrateurs de pouvoir accorder la subvention réclamée par l’agent général en faveur du docteur Goulven, médecin de la marine en congé, résidant à Belle-Île-en-Mer, dans le bourg de Sauzon. Faute de subsides, celui-ci n’avait pu mener à bien ses expériences d’immunisation, ni fournir les preuves indispensables de succès. La découverte du sérum O… indiquait, malheureusement pour la Compagnie, que ce genre d’hypothèses n’était pas vain. En somme, la responsabilité de l’échec incombait en partie aux membres de la Commission des Comptes, qui, dans un louable désir d’économie, avaient lié les mains des administrateurs par le statut de 1899, et, d’autre part, à l’agent général M. Guichardot, qui,