Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/104

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Elle invita aussi à déjeuner avec Paul de Saint-Victor, le lettré raffiné, un chanteur d’opérette. Ce n’était pas par dédain ; le talent, à défaut de titre, dont elle ne faisait plus de cas, disait-elle, lui paraissait, sous quelque forme que ce fût, avoir sa valeur.

Très libérale, très modérée en politique, son jugement sur les hommes de 1848 a longtemps paru définitif.

La langue de Daniel Stem est d’une pureté qui n’accuse pas la recherche. La vision des faits très nette donne à son style un dessin admirable, dont la beauté dissimule merveilleusement le manque de couleur voulu de la phrase. Mme  d’Agoult, écrivain austère, tenait à être un esprit qu’on admire plus qu’un cœur qui émeut.

Pourtant son beau livre sur la Révolution de 1848 contient des pages dans lesquelles elle s’est, pour ainsi dire, abandonnée. Certaines, comme celles consacrées à Jules Grévy, vont jusqu’à la divination. Après avoir tracé de lui un portrait moral qui en fait le type du républicain selon les principes, elle parle de sa prévoyance en termes enthousiastes.

« Le rôle de M. Grévy, écrit-elle, eut le mérite d’être prépondérant à la Constituante. » Son amendement célèbre était, de l’avis de Daniel Stern, de la prescience. Il voulait que le président de la République, au lieu d’être élu par le suffrage universel, fût un président