Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/127

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cipes philosophiques, le sens de la justice, les exigences de la droiture, peuvent doter un homme désireux de perfectibilité, Littré le possédait.

Ses convictions politiques étaient en accord parfait avec ses doctrines philosophiques ; mais tout son savoir et toutes ses vertus ne lui inspiraient ni ne lui soufflaient la plus fugitive notion d’idéalisme. Il dépassait dans le sens du matérialisme la pensée même de son chef ; là où Stuart Mill, son égal comme disciple d’Auguste Comte, disait : « Le positivisme n’est pas nécessairement une négation du surnaturel, il renvoie simplement la question à l’origine des choses ; » là où le fondateur du positivisme s’efforçait de dégager une sorte d’idéalisme religieux, Littré se cantonnait dans l’absolu matérialisme. Auguste Comte laissait l’esprit libre, déclarant qu’il n’y avait pas plus d’arguments pour que d’arguments contre en faveur de l’au-delà ; Littré, lui, n’hésitait pas à nier. Lorsqu’on le connaissait, on l’aimait et on l’honorait malgré la tristesse de voir le terre-à-terre d’une aussi vaste intelligence. Il est vrai qu’il y faisait entrer l’humanité tout entière, et cela lui suffisait. Histoire de tous les peuples, science dans toutes ses branches, langues de tous les pays, esprit humain à travers les siècles, Littré en possédait la connaissance comme nul ne l’a eue avant lui.

Le bagage était colossal ; il ne s’inquiétait