Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/159

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entre ciel et terre et qui perdent la piste de la vie.

« Telle est la phrase stupide, me dit Toussenel en me la répétant, dont vient d’accoucher mon ami Courbet.

— J’ai voulu dire, ajouta Courbet en s’adressant à moi, que les Grecs m’embêtent parce qu’ils divinisent toujours l’homme. L’homme est l’homme : il faut le laisser homme.

— Toi que je trouve digne du titre d’artiste, non pas quand tu choisis tes modèles au village parmi ce qu’il y a de plus grossier, non pas quand tu réalises le laid, dit Toussenel, et que tu le copies aussi vilainement qu’il est, ni quand tu fournis par tes bourgeoises engraissées des pages de mauvais socialisme à ton frère et ami Proudhon, je te trouve grand artiste, entends-tu ? quand tu donnes une âme à tes animaux, car toi, tu les connais autrement que Michelet, tu les as fréquentés. Comment ne peux-tu pas comprendre que l’homme, lorsqu’il peint l’homme, le divinise par la beauté, quand toi tu dotes l’animal que tu peins d’un quelque chose de supérieur à ce que tu lui vois. Tes biches, tes chevreuils, tes cerfs et jusqu’à tes paysages, ont une âme, parce que tu n’as pas fait la gageure de les peindre laids. Du train dont tu vas, toi le chef du réalisme, tu ne chercheras bientôt plus pour modèle humain que ceux ou celles qui ont des tares, la laideur ne te suffira plus ! Moi, vois-tu, je n’ai, comme ma jeune amie