Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/173

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répétait Edmond Texier, et il racontait partout le mot d’un gavroche criant à la princesse Belgiojoso dans la rue : « Ah, celle-là qu’a oublié de se faire enterrer ! » On répétait les vers de Musset :


Elle est morte et n’a point vécu ;
Elle faisait semblant de vivre,
De ses mains est tombé le livre
Dans lequel elle n’a rien lu.


Les hommes se vengent avec cruauté des femmes qui ont été plus passionnées pour des idées que pour l’amour. C’est un vol qui leur est fait. La princesse Belgiojoso, à laquelle Dall’Ongaro me conduisit, est restée l’une de mes admirations. Elle a aimé l’Italie ardemment, fidèlement, jusqu’à sa mort, a vécu pour elle exclusivement et lui a consacré sa beauté, son intelligence, sa fortune. Christine Trivulzio a eu la récompense suprême de voir sa patrie délivrée. Elle ne s’est éteinte que son œuvre achevée. La princesse Belgiojoso est l’une des plus belles figures de femme qu’il y ait eu en Europe au siècle dernier. De 1848 à 1860, elle a été une incomparable héroïne.

Tant de beaux yeux, de paroles vibrantes, de chants d’espoir ou de prière, émurent tous les cœurs français pour un malheur national si poétiquement pleuré.

La généreuse France eut « grande pitié pour