Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/231

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fut par là éveillée et si je pressai Ménard de questions.

Je connaissais vaguement le félibrige, malgré le bruit qui avait été fait autour de son passage du Rhône, de son succès à Nîmes, où les félibres avaient improvisé en vers et en prose.

« La Grèce se retrouve aux jardins de Saint-Rémy. Elle a une éclosion nouvelle sous le ciel phocéen. Tournez les yeux vers ce mouvement, reprit Ménard, et vous comprendrez à quel point l’âme poétique de la Provence azurée est attique. Je trouve la langue provençale superbe. Elle se prête aux grandes envolées, aux récits tragiques ; en même temps elle est maligne, spirituelle, chaude, c’est-à-dire ensoleillée à ravir. Elle est saine, claire, ampoulée ou simple au gré de l’écrivain. La nature, pour elle comme pour la langue d’Homère, se peint de façon imagée, avec un seul mot. Vous aimerez l’héroïne de Mistral, son pays, sa langue et lui.

— Mais comment juger une langue traduite, dis-je à Ménard.

— Vous la lirez dans le texte, aisément. Avec le vieux français de votre Picardie, un peu de latin et d’Italien, dont vous êtes teintée, vous comprendrez. J’irai demain vous en déclamer un chapitre et vous chanterez :

Ô Magali, ma tant amado,
Mete la tèto au fenestroun.

— Ce n’est pas plus difficile que cela,