Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/114

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tout ce qui tient aux arts du dessin, sont seuls artistes, et que les musiciens ne le sont pas. Effectivement, vous avez un journal des artistes, rédigé par des peintres et pour des peintres, et ne traitant guère que de matières de peinture. Si l’on dit : Le Gouvernement encourage les arts, cela veut dire : Le Gouvernement commande des statues, des tableaux, fait bâtir des monuments ; s’il y a au ministère un article du budget intitulé : Encouragement aux arts, il s’appliquera aux peintres, architectes, graveurs, etc. Des pauvres musiciens il n’en sera pas question.

Combien avez-vous de peintres à Paris ? Je n’aurais pas le temps de les compter. Combien de compositeurs ? Mais, je crois, quatre ou cinq. D’où vient cela ? Serions-nous donc un peuple anti-musical, ainsi qu’on veut nous le persuader depuis si longtemps ? Non, gardez-vous de le croire. Interrogez l’Allemagne, pays de la musique, comme l’Italie est celui des chanteurs ; demandez-lui ce qu’elle pense de nos compositeurs. Elle s’avouera notre inférieure : elle vous dira qu’un opéra nouveau est un événement chez elle, et qu’un succès est encore plus rare ; que, si ses théâtres existent, c’est grâce à nos compositeurs. Elle vous nommera tous les opéras de Méhul, qu’elle a appréciés avant nous, dont les partitions, que nous ne comprenions pas toujours, excitaient l’enthousiasme chez elle ; elle vous citera tout le répertoire de Boïeldieu, d’Auber, d’Hérold, dont les ouvrages traduits, et non imités, comme on le fait si gauchement en Angleterre, sont exécutés sur tous les théâtres, et font toujours le