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Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/157

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restait plus de place qu’aux bancs du théâtre et aux premières loges ; pas un n’aurait eu l’audace de se montrer à ces places qu’occupaient ordinairement les personnes titrées, et l’on aimait mieux s’en retourner chez soi. Le public parut d’abord surpris de cette solitude inaccoutumée. Lully avait beaucoup de talent, par conséquent il ne manquait pas d’ennemis ; on répandit bientôt le bruit qu’il était tout à fait disgracié, que le roi l’avait chassé de sa présence, et avait défendu à toute la cour de mettre les pieds à son théâtre. Peu s’en fallut que ceux qui assistaient à l’opéra ne se crussent compromis par leur seule présence ; quelques bourgeois timorés essayèrent même de sortir ; mais comme on refusa de leur rendre leur argent, ils aimèrent encore mieux risquer leur sûreté personnelle que de perdre leurs 40 sous. C’est en présence d’un public ainsi disposé que la superbe Armide allait se représenter.

Le prologue, tout à la louange de Louis XIV, comme de raison, fut, on ne peut pas mieux reçu. Le chœur si gracieux,

Dès qu’on le voit paraître.
De quel cœur n’est-il pas le maître ?

fut accueilli par des applaudissements unanimes ; là, on pouvait approuver sans se compromettre, et le sens des paroles servait de prétexte pour rendre justice au charme de la musique. Mais, passé le prologue, les marques de satisfaction devinrent