Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/229

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Quand la Malibran devait chanter, le matin, elle restait des heures à faire des gammes dans tous les tons et tous les exercices de voix possibles, mais sans jamais essayer de chanter le rôle qu’elle devait dire le soir, pour conserver toute son inspiration, et néanmoins avoir la voix assez assouplie et assez docile pour que toutes les fantaisies artistiques qu’elle improvisait si délicieusement, lui vinssent avec cette sûreté d’exécution qui ne lui a jamais manqué. Il y en aurait trop à dire sur les travaux des grands artistes, des artistes consciencieux et véritablement dignes de ce nom. C’est d’une classe beaucoup plus modeste, des choristes d’opéra que je veux m’occuper aujourd’hui.

Je ne prétends pas vous dire que leur art exige de grandes études, et des travaux bien assidus. Hors les heures consacrées aux répétitions et aux représentations, leur temps est à eux tout entier, mais leurs appointements sont modiques, et ne peuvent suffire à leur existence ; aussi n’existe-t-il pas de plus grands cumulards que les choristes : les uns donnent des leçons de musique à la petite propriété, ou copient de la musique ; presque tous chantent dans les églises, renouvelant la vie de l’abbé Pellegrin, qui

… Dînait de l’autel et soupait du théâtre.

D’autres sont musiciens dans les légions de la garde nationale, ou dans les bals qui ne commencent qu’à l’heure où finissent les spectacles. À force de travail et de peine, il en est qui parviennent à se faire 4 ou 5