Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/321

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mois le compositeur tint l’émigré caché chez lui ; et de quelles précautions ne fallait-il pas s’entourer, à une époque où la pitié était un crime et la dénonciation une vertu ! Enfin, à force de soins, de peines et de démarches, il parvint à faire rayer son ancien camarade, et celui-ci put, grâce à son dévouement, recouvrer à la fois sa liberté et sa fortune.

Dalayrac compta peu d’insuccès dans les cinquante-quatre opéras qu’il fit représenter ; la plupart au contraire obtinrent une vogue immense, et il suffira de citer les titres principaux : Camille, Ambroise, Marianne, Adèle et Dorsan, la Maison isolée, Gulnare, Alexis, Monténero, Adolphe et Clara, Maison à vendre, Lehéman, Picaros et Diego, La jeune Prude, Une heure de mariage, Gulistan, Deux mots, Lina, etc.

Grétry, dans sa longue carrière, eut un moment où la popularité faillit l’abandonner : il était déjà vieux, lorsque Méhul et Cherubini donnèrent ces ouvrages sévères et fortement instrumentés qui contrastaient d’une manière si sensible avec les opéras joués précédemment. Grétry essaya de modifier sa manière dans ses derniers ouvrages ; mais son génie était épuisé, et d’ailleurs les efforts qu’il faisait pour atteindre aux proportions des ouvrages du goût moderne lui ôtaient le naturel et la facilité qui prêtaient tant de charmes à ses premiers travaux. Son ancien répertoire fut presque abandonné pendant près de dix ans pour faire place aux œuvres écrites d’un style plus sérieux. Mais lorsque la société tenta de se reconstituer, au commencement de ce siècle, la réaction fut générale, dans