Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/91

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S’il eût embrassé cette carrière, il serait devenu un pianiste des plus distingués ; il avait une facilité et une pureté d’exécution très-remarquables, et, quoiqu’il eût depuis bien longtemps renoncé à s’exercer, on rencontre dans ses ouvrages de piano des traits d’une extrême élégance, et qui décèlent combien il connaissait les ressources de cet instrument. Mais cette gloire ne lui suffisait pas, c’est à être compositeur qu’il aspirait.

Il prit des leçons de Mehul, et concourut à l’Institut. Le sujet de la scène était Mme de Lavallière, que Louis XIV veut enlever du couvent où elle s’est retirée. Les concurrents avaient trois semaines pour composer leur musique. La mère d’Hérold va pour le visiter à l’Institut, six jours après son entrée en loge ; elle le trouve jouant à la balle dans la cour ; sa tâche était terminée. Quelques instances qu’on lui fit, il ne voulut pas rester un jour de plus.

— J’ai été enfermé assez longtemps quand j’étais en pension, dit-il, à présent je veux respirer le grand air.

Il eut le premier grand prix, qu’il partagea avec M. Cazot.

Une des plus utiles prérogatives attachées au prix de Rome, était de vous arracher à cette funeste conscription qui décimait si cruellement nos familles à cette époque, que tant de gens font semblant de regretter. Hérold, âgé de moins de vingt ans, dut à ses succès d’éviter d’aller porter le mousquet sur les bords glacés de la Néva. Il partit pour Rome, où il ne séjourna que peu de temps ; il vint ensuite s’établir à Naples.