Page:Adelswärd-Fersen - Messes noires ; Lord Lyllian, 1905.djvu/35

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
23
MESSES NOIRES

n’avoir jamais appartenu qu’à des fantômes… Dans un troisième tiroir, l’enfant aperçut le petit album où la morte avait, entre des dessins représentant quelques paysages des environs, noté brièvement un journal de sa vie.

Renold ouvrit le livre.

Il y avait des dates, des lignes d’une écriture fine, tremblante un peu : 17 Avril : Rien… 18 Avril : il est venu… 19 Avril : Rien… 23 Avril : Rien…

— Papa voyageait, pensa Renold.

Mais au moment de remettre l’album à sa place, il vit dans le fond de la cachette obscure un paquet de lettres. Une boucle de cheveux dans un médaillon de cristal brillait à côté de ces lettres…

— Oh, des cheveux de maman !…

Il prit vite, de peur qu’on le voie, le médaillon fragile et le paquet.

Puis il courut à la fenêtre pour regarder.

— Mais, elle était blonde, comme sur son portrait… Papa me l’a toujours dit… réfléchit Renold en examinant la boucle brune qui frisait sous le cristal.

Et le gamin hésitait… Ces lettres !… Elles lui diraient peut-être la vérité. Alors, pris d’une résolution subite, il dénoua le ruban qui retenait lettres et médaillon et jeta les papiers pêle-mêle sur une table.

Ses yeux, alors, rencontrèrent une phrase, une seule…

« Nous ferons mourir cet homme, n’est-ce pas, car je le hais… oui, ma chérie, je hais Lyllian autant que je t’adore ! »

» Ton Rowland ».

Oh, l’affreuse brûlure que ressentit Renold ! Sans