Page:Adelsward-Fersen - Et le feu s’éteignit sur la mer.djvu/11

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Révélation soudaine. Comment pouvait-on ne pas préférer passionnément ces civilisations disparues qui dans leur polythéisme aimable avaient accueilli tous les Dieux à la table du plaisir — tous les Dieux et tous les daïmions — sauf la douleur ? La douleur… c’était vraiment les disciples de Jésus et le Galiléen lui-même qui l’avaient instaurée — pour le scandale du monde.

Depuis vingt siècles cette doctrine monstrueuse du sacrifice prévalait, par la lâcheté devant d’imaginaires supplices, par la peur d’un ridicule enfer. Comme si l’ombre du Golgotha s’était étendue sur l’univers sans bornes, on bannissait partout la joie souriante et lumineuse. Les actes de la vie devenaient des péchés. On catégoriait l’Amour. Les prêtres n’admettaient plus que les actes préparant et glorifiant la Mort. Quel anathème et quelle sottise ! Alors, pour quelles raisons leur Dieu (sauf à être un Dieu injuste et incroyable) nous aurait-il créés, puisqu’une fois né on ne doit plus songer qu’à disparaître ?

À travers les siècles, du reste, le Christianisme dégageait son sens impie en regard des hommes. Partout, la guerre au signe de la croix. Parfois un répit, durant lequel les anciens mythes revenaient. La Renaissance semblait ressusciter en une brève