Page:Adelsward-Fersen - Et le feu s’éteignit sur la mer.djvu/46

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— Alors…

Et ahuri, le bonhomme partait, empochant le pourboire. Ç’avait été si soudain comme geste, et si prompt comme résolution, que Gérard, un peu gêné, parce qu’elle ouvrait les yeux, ne sut quoi dire, lui tendant simplement un verre d’eau sucrée que l’on avait laissé là.

— Voyons, hasardait-il avec le toupet subit des timides, voyons, mademoiselle, il ne faut pas vous décourager pour ça. Je vous assure que vous n’avez pas mal chanté. Vous aurez eu peur. Voilà tout. Mes copains l’ont bien vu. Et puis ça doit être un coup monté. Avec ce tas de vieux chameaux qui broutent… Là, buvez… Allez-vous mieux ?

— Merci monsieur, balbutiait-elle… puis la gorge sèche, des larmes lui coulant lentement sur les joues :

— Enfin… pourquoi est-ce qu’ils ne me laissent pas gagner ma vie ?… si je fais ça, monsieur, c’est pas pour mon plaisir, allez… C’est la première fois que je viens ici. Et j’ai dû attendre huit jours, mon début.

— Mais je ne vous ai jamais vu en ville… Il y a-t-il longtemps que vous êtes à Sedan ?

— Depuis hier — avec cet engagement d’ici. — Mon Dieu, mon Dieu, sanglotait-elle, ils n’en voudront plus, après ce soir…