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Page:Adelsward-Fersen - Notre-Dame des mers mortes (Venise).djvu/240

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NOTRE-DAME DES MERS MORTES

mort. Il venait s’agenouiller près d’un mort sans avoir même apporté des roses, ces roses que l’on pose sur les tombes comme pour embaumer le sommeil de ceux qui dorment, les prunelles fixes. Un mort, un cher et tendre mort, leur amour si jeune, si beau, si triste, Il le voyait étendu, les ailes repliées à la façon des oiseaux lorsqu’ils ont froid, les cheveux pareils à de l’or et à du soleil, aveugle, le petit mort. Ce soir, il venait prier sur le cercueil de l’amour. Oh, le rosaire infiniment délicat et céleste qu’il allait égrener des doigts et des lèvres. Oh, les litanies où il sentirait vibrer son âme, toute son âme d’artiste ! Il était séparé du monde, seul, bien seul dans cette cour, dans ce cloître. Les arceaux devenaient ceux d’une église, d’une cathédrale. Notre-Dame des mers mortes !… Notre-Dame, mon cœur est pareil à tes lagunes ; il est désolé, et des glaives en perçent le désert, par endroits. Mais donne-moi leur oubli ! Et, Jacques, transfiguré, les bras tendus vers le