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LE LIVRE DE GOHA LE SIMPLE

cemment à Mirmah de lui en énumérer au hasard. La vieille servante lui cita les noms du laitier, du meunier, du porteur d’eau et de tous les commerçants du quartier. Nour-el-Eïn la congédia avec colère.

Nour-el-Eïn avait coutume de recevoir Warda, la dallala, dont le métier consistait à faire le tour des harems pour écouler les marchandises que lui confiaient les principaux boutiquiers de la ville. Un jour que la dallala se trouvait auprès d’elle au moment où les jeunes gens traversaient la cour, elle ne put se maîtriser et l’interrogea.

La dallala, qui s’était rapprochée de la fenêtre, eut une réponse évasive.

— Je crois avoir vu un voile sur son visage, dit-elle.

— Il le soulève avant de traverser le vestibule, répliqua Nour-el-Eïn

Les sourcils froncés, la dallala fit mine de réfléchir.

— Ils sont trois dans la ville qui se couvrent la tête. L’un s’appelle Akr-Zeid-Taï, l’autre Waddah-Alyçum, et le dernier Mokawa-Kendi. Ils sont fameux pour leur beauté… C’est tout ce que je puis te dire…

Elle attendait un aveu. S’apercevant que Nour-el-Eïn évitait son regard, elle porta sa lourde main teinte de henné sur les genoux de la jeune femme.

— La prochaine fois, promit-elle, je te dirai son nom.

— C’est inutile, Warda, balbutia Nour-el-Eïn. Cela m’est indifférent.