Eïn. Est-ce qu’on achète beaucoup dans les harems ?
Un moment la dallala demeura interdite. Elle lisait clairement l’hypocrisie sur le visage souriant de la jeune femme, mais il y avait en elle tant d’assurance qu’elle hésitait à la démasquer.
— Ce n’est pas bien, s’écria-t-elle enfin, tu te moques de moi et je ne suis qu’une pauvre femme. Si tu veux que je m’en aille, je m’en irai…
Nour-el-Eïn lui prit la main en signe d’amitié, puis, sourdement, elle lui dit :
— Eh ! bien… parle !
— Voici… répondit Warda en fixant son œil sur Nour-el-Eïn. Le jeune homme qui vient rendre visite à ton mari, c’est Waddah-Alyçum.
— Ah ?
— Hier, avec ses deux amis, il était au hammam.
— Lequel ?
— Loin d’ici… Il habite l’autre côté d’El-Kaïra… Le palais que lui a laissé son père est à la pointe du Khalig.
— Un joli palais ?
— Un palais de prince, ma chérie… Le Nil passe sous les fenêtres du nord, du sud, de l’ouest… les fenêtres de l’est donnent sur un jardin rempli d’arbres.
Nour-el-Eïn se taisait. Sans doute Waddah-Alyçum vivait solitaire. Pourquoi ne l’emmènerait-il pas dans cette maison qu’elle parerait de sa beauté, qu’elle animerait de ses danses et de ses chansons ?…