Page:Ades - Josipovici - Mirbeau - Le Livre de Goha le Simple.djvu/320

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blance. Est-ce que ton visage est comme le mien ?

— Non, dit Goha, sentant qu’il faisait ainsi plaisir à son père.

— Non, n’est-ce-pas ? Tu es peut-être plus beau, mais de ressemblance, il n’y en a point. C’est aussi mon opinion… Maintenant, est-ce que ton cerveau est comme le mien ?

— Non, répondit Goha précipitamment.

— Enfin, est-ce que nous avons la même religion ?

Ne sachant quelle réponse son père attendait de lui, Goha, embarrassé, baissa les yeux et se mit à caresser la ceinture de laine qui faisait trois fois le tour de sa taille.

— Parle sans crainte.

— Nous avons la même religion.

— Permets-moi de te contredire, répliqua Mahmoud, en lui posant cordialement la main sur les genoux.

C’était la première fois qu’il traitait son fils comme un homme, comme un visiteur à qui l’on doit des égards et Goha s’inquiétait de ces manières inaccoutumées.

— Tu te trompes, mon cher, reprit Mahmoud, tu n’es pas un musulman. Est-ce que tu fais ta prière quatre fois par jour, est-ce que tu sais lire le Coran ? Si tu savais lire le Coran, est-ce que tu aurais ignoré que notre Prophète a dit : N’approche ni ta mère, ni ta nourrice ?

Goha était accablé par la logique de son père.

Mahmoud reprit lentement, en comptant sur ses doigts :