savais ta grosseur d’El-Kaira relativement au globe !…
— Oh ! fit Goha, que le bon repas et les beaux vêtements avaient disposé à l’optimisme, le monde est grand… Tout ici-bas est question de destin… Les uns sont gros et les autres sont maigres… Un oiseau qui marche ne ressemble pas à un chameau qui vole… Est-ce vrai, mon Cheik ?
— Sans doute… dit El-Zaki, interloqué. Et se reprenant aussitôt : Mais tu dois confondre… à moins que par chameau qui vole tu n’entendes une chimère…
Goha l’interrompit :
— Et l’homme ? fit-il avec un vif intérêt, comment va l’homme ?
— Quel homme ?
— Mais l’homme que tu avais mis dans l’huile… ̃Que Dieu le veuille ! j’espère qu’il se porte bien ?
Cheik-el-Zaki ferma les yeux, pris de vertige.
Au temps de ses entretiens avec Goha et Waddah-Alyçum, il souriait aux réflexions du Simple. Lors même qu’il s’écriait : « Créature étrange ! », ou qu’il s’émerveillait sur ce produit bizarre de la nature, il gardait, au fond de lui-même, la certitude souriante de sa propre supériorité. En réalité, il avait réduit Goha à la conception qu’il en avait et lui avait assigné une case dans sa pensée.
Maintenant, il avait devant lui un homme libre, indépendant et qui, tranquillement, lui tenait des propos qu’il ne comprenait pas. « Qu’est-ce qu’il dit ? » songeait-il. « Où suis-je ? De nous deux,