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EXTRAIT DE LA PRÉFACE DE LA PREMIERE EDITION

envers les idées fausses. Nous avons dit plus haut que l’apologiste doit soutenir la vérité catholique tout entière, et qu’à l’égard des doctrines contraires à l’enseignement de l’Eglise il doit être intransigeant. Mais il en va tout autrement des hommes qui soutiennent ces doctrines. Aux yeux de l’apologiste, l’adversaire de la religion, à moins de preuves manifestes du contraire, est toujours un homme de bonne foi, un ami de la vérité. Et ici la charité n’est souvent que de la justice. Autrefois les ennemis de la religion étaient presque toujours des rebelles, des hommes de mœurs dissolues, chez qui la bonne fois manquait totalement, ou chez qui l’erreur de l’esprit était la conséquence et le châtiment des vices du cœur. Il n’en est plus de même aujourd’hui ; la grande majorité des adversaires du catholicisme vit dans la bonne foi. Pour plusieurs, cette bonne foi a toujours été exempte de faute, parce qu’ils n’ont pas reçu le baptême, ou parce qu’ils ont été élevés soit dans une fausse religion, soit dans l’athéisme. Pour d’autres, leur erreur a été coupable à l’origine, mais ils sont depuis longtemps rentrés dans la bonne foi, et lorsque l’on considère tout ce qu’il leur aurait fallu de courage, de soins minutieux et constants pour conserver leurs croyances religieuses dans le milieu qui a entouré leur enfance ou leur jeunesse, on songe plus à les plaindre qu’à les condamner. Combien d’âmes, parmi nos frères séparés, parmi nos incroyants et nos sceptiques, ont soif de la vérité et la cherchent, mais hélas ! sans apporter à cette recherche le courage, parfois héroïque, qui serait nécessaire pour arriver à la conquérir ! Dieu nous garde de toute parole amère, de tout soupçon injurieux à leur égard ! Leur erreur se comprend trop aisément, quand on réfléchit à toutes les difficultés que présente la connaissance certaine de la foi catholique, pour qui n’a pas grandi dans le sein de cette unique Eglise du Christ, qui est la colonne de la vérité. Que d’objections et de difficultés de toute nature se présentent aux esprits, dont les préjugés sont malheureusement contre la vérité ! Les preuves les plus éclatantes de la divinité du christianisme, les miracles et les prophéties, sont elles-mêmes l’objet de tant d’attaques, qu’elles perdent une grande partie de leur évidence, lorsque des esprits, nourris en dehors de la vraie lumière, entreprennent de les étudier en détail ; un certain nombre d’objections ne sont résolues que péniblement par les défenseurs de la foi catholique, et les réponses n’ont pas toujours cette éclatante supériorité qu’on voudrait trouver du côté de la vérité. Ceux-là seuls, croyons-nous, peuvent nier les diffiuiltés sérieuses qu’offre l’étude de la religion aux homnes élevés en dehors d’elle, qui ne les ont jamais considérées de près et scrutées à fond. La charité s’impose à l’apologiste catholique, comme un devoir sacré, à l’égard de ceux qu’il combat. D’ailleurs, s’il était permis de nier ou de mettre en doute la bonne foi des adversaires, la discussion n’aurait plus raison d’être…

J.-B. Jaugky.
Auteuil, 28 juin 1888.