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CELTES (KEL1610N DES)


article) de G. Dollin, Transmigration (Celtic) et de J. A. Mac Culloch, Blesl (Abode of thé).

IV. Conversion des Celtes au christianisme. — S. Martin fut incontestablement le grand évangélisaleur de la Gaule au ive siècle. Antérieurement, des groupements de chrétiens s'étaient formés dans les villes, mais c’est à lui que revient la gloire d’avoir fait connaître la foi chrétienne aux pagani des campagnes gallo-romaines. Arracher les populations rustiques à la pratique de leurs cultes naturistes, à leurs antiques superstitions, telle fut la tâche à laquelle il dévoua toute son énergie. L’entreprise n'était pas aisée. S’il convertit des foules de pagani à la religion chrétienne, maintes pratiques païennes subsistèrent, longtemps encore après lui, dans les campagnes. Il faudra des efforts séculaires pour les extirper.

Le renom de S. Martin rayonna vile an loin à travers la Gaule et hors de Gaule. C’est à S. Martin qu'était dédiée l’unique église catholique que S. Augustin et ses compagnons trouvèrent en arrivant en Angleterre en 697. Dans cette église de Cantorbéry, priait la reine Berlhe, tille de Charibert, roi de Paris, et épouse d’Ethelbert, roi de Kent, qui était païen. La conquête de la GrandeBretagne par les Anglo-Saxons avait replongé le pays dans le paganisme.

On a cru que S. Ninian, l’apôtre des Bretons du Strat-Cluyd et des Pietés du sud, de même que S. Patrice, l’apôtre de l’Irlande, avaient séjourné auprès de l'évêque de Tours avant d’entreprendre leur œuvre évangélisalriçe. Plus tard, la légende unit même Patrice à S. Martin par un lien de parenté.

Les débuts du christianisme dans l’ile de Bretagne sont obscurs. Au ive siècle, on trouve une Eglise bretonne constituée, dont les évêques (igurent dans les grands conciles tenus sur le continent, à Arles (314), à Riinini (350, ). D’après Gildas, porté au pessimisme, les Celtes de Bretagne auraient, en général, accueilli sans enthousiasme (tepide) le christianisme. C’est tout ce que le sombre écrivain nous apprend de l'évangélisation du pays. Au * siècle, les missions de S. Germain d’Auxerre, accompagné, la première fois, de S. Loup de Troyes ('r 2 9~ 43 i) et, la seconde fois, de Sévère de Trêves (44?) » eurent pour but d’arrêter les progrès du pelagianisme. Son biographe nous montre Germain picchant, non seulement dans les églises, mais aux carrefours, dans les campagnes, dans les terrains vagues, tant étaient nombreuses les foules à catéchiser

Au vie siècle, sous la poussée anglo-saxonne, les moines bretons du Pays de Galles et du Cornwall émigrent avec leurs ouailles, et, devenus missionnaires, implantent le christianisme dans l’Armorique continentale, terre gallo-romaine dont l'évangélisation avait été à peine ébauchée avant leur arrivée, au sud et à l’est de la péninsule.

En l’an '|32, Patrice, né en Grande-Bretagne, aborda en Irlande comme missionnaire de l’Evangile. Le christianisme avait pénétré avant lui chez les Scots d’Erin, mais sans faire beaucoup d’adeptes. A Patrice revient sans nul doute le titre d’apôtre des Irlandais.

Dans la grande ile voisine, les Pietés méridionaux, convertis par Ninian, apostasièrent au ve siècle. Il appartint à S. Columba et à ses disciples et successeurs, les moines d’Iona et de Lindisfarne, de reprendre l'œuvre de Ninian etd'élendre vers le nord et vers l’est le règne de l’Evangile, aux vi' et vii «  siècles.

Tous ces missionnaires, tous ces fondateurs et organisateurs de nouvelles chrétientés étaient des moines. L’Eglise celtique fut essentiellement monastique. « La première ardeur de la foi, a écrit très justement Frédéric Ozanam, qui partout ailleurs conduisait les chrétiens au martyre, poussait les néophytes irlandais au monastère » (La civilisation chez les Francs, Paris, 1849, p. 97).

V. Survivances et superstitions. — Longtemps survécurent chez les Celtes, tant du continent que des pays insulaires, des vestiges de leurs cultes païens. Bien des traces des pratiques religieuses pré-chrétiennes peuvent encore être observées de nos jours.

On a même voulu voir dans les moines d’Irlande des continuateurs des druides, les monastères, si nombreux dans l’ile dans le haut moyen âge, n'étant que des confréries druidiques christianisées. Celte hypothèse, fruit de l’imagination d’Alexandre Bertrand, est dépourvue de fondement (voir Chrétientés celtiques, p. 68-70).

La pratique des sacrifices sanglants s’est-clle continuée chez les Celtes devenus chrétiens ? Certains textes du moyen âge permettent de le croire pour l’Irlande et l’Ecosse. Une mitigation du sacrifice consistait à tirer du sang du premier animal rencontré par les troupes qui se rendaient au combat (Martin, Description o[ the Western Islandsof Scotland, 1716, chez Pinkerton, Voyages, III, p. 607), et encore à arroser du sang d’un être humain ou d’un animal les fondai ions d’un édilice (Robinson, op. cit., p. 189, 196).

La divination par le chant des oiseaux (corbeau, roitelet) a aussi continué à l'époque chrétienne (voir Chrétientés Celtiques, p. 22 ; R. I. Bbst, Prognostications from the Raven and the ]Vren, dans Erin, VIII, 1 y 1 6, p. 130-126).

Les feux de joie de la fête du i* r mai (Bellane) ont été allumés en Irlande et en Ecosse jusqu’au xviii e siècle, et même plus tard (Joyce, Soc. histori, I, p. 391 ; Ivendrick, Druids, p. 12y-130).

Mais il faudrait beaucoup plus d’espace qu il ne nous en est accordé pour passer en revue, mémo sommairement, toutes les survivances, vraies ou supposées, de l’ancienne religion dans les populations celtiques des Iles Britanniques etde la Bretagne armoricaine, observances magiques, culte des fontaines, pratiques litholatriques et autres superstitions rustiques : tanta gentium in rébus frivolis plerumque religio est (Pline 1 Ancien, Hist. nat. XVI,

2 40).

Sur les superstitions de ces pays, on pourra consulter notamment les Actes des conciles et les Pénitentiels (voir Chrétientés celtiques, p. xni et xvi-xvn) et les ouvrages suivants : Eleanor Hull, Folklore of the British Isles (London, 1928) ; L. Gougaud, Etude sur 1rs « lorieae » celtiques et sur les prièies qui s’en rapprochent (Bulletin d’ancienne littérature et d’archéologie chrétienne, I, 1911, p. 265-28lj 11, 1912, p. 33-4 1, 101-127) ; A. Macbain, Gælic Incantations (Highland Monthly, III, 1891) ; J. F. S. Wilde, Ancient Cures, Charma and Uêages oflreland (London, 1890), ainsi que les travaux de Henderson, Cnrmicliæl, Mackenzie, Joyce, Wood-Martin, Douglas Hyde. Anatole Le Braz et L. F. Sauvé indiqués eiapres à la Bibliographie.

Ouant aux superstitions combattues par les missionnaires chrétiens du haut moyen âge en Gaule, en Espagne, en Germanie et ailleurs, très abondantes sont aussi les sources d’information : d’abord également les conciles et les recueils pénitentiels à l’usage du clergé continental ; par ailleurs, les ser-