Aller au contenu

Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/435

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

853

CURIE ROMAINE (CARDINAUX)

854

Les origines historiques de l’inslitution cardinalice se confondent avec celles du preshyterium dans la priuiitiAC Eglise. Dès Tcpoque initiale du christianisme, nous trouvons en chaque communauté vm groupe, un organisme connu sous le noiu de piesbyLeiiuin. Il était formé de prêtres et de diacres, sous la présidence d’un évêque, qu’ils avaient pour mission comnuine d’aider de leurs conseils et de seconder dans la conduite de son troupeau. Saint IcxACKd’Antioche fait souvent mention de ce groupe ou presbytère, auquel les fidèles doivent respect et soumission. Il enseigne aux E^ihésiens, c.ii, 2, Patres (ipustolici, édit. Funk, t. I, p. 21 4, à « pratiquer l’obéissance parfaite dans la su[)ordinalion à l’évéque et au presljytère » ; il félicite les Magnésiens, c. 11, iùid., iJ. 232, « d’être soumis à l’évéque, comme à la bonté de Dieu, et au presbytèi-e, connue à la loi du Christ » ; il exhorte les Tralliens, c. iii, i. ibid., ). 2 ! ^ ! ^, à « révérer les presbytres, comme le sénat de Dieu et le conseil des Apôtres » ; aux Philadelphiens il écrit, c.iv, ibid., p. 36^, de tout faire en union « avec l’évéque, le presl)ytère et les diacres », et, c. vii, i. ibid., p. 270, il leur « crie à hante voix et au nom de Dieu : Obéissez à l’évéque, au presbytère et aux diacres ». Dès lors donc il existait un conseil épiscopal, dans la composition duquel entraient des prêtres et des diacres. Chez Ignace, il est rsà, la dénomination de presbytère est encore généralement réservée aux premiers ; mais nous savons par ailleurs qu’elle ne tarda i^as à être étendue de façon à embrasser l’ensemble des conseillers de l’évéque.

Plus que tout autre, l’évéque de Rome, à raison de la gravité de sa tâche et de sa responsabilité, dut tôt sentir le besoin d’un corps choisi de conseillers et d’aides. Aussi bien le Liber poutificalis, édit. Duchesne, t. I, p. 126, nous montre déjà autour du pape EvARisTE (de 99 à 107 environ), un groupe de sept diacres, évidemment ainsi constitué en mémoire des sept élus dont il est question au chap. vi des Actes des Apôtres. Saint Pierre même aurait déjà ordonné sept diacres, ibid., p. 118, pour assister l’évéque à la messe. Plus tard, les diacres furent chargés, dans Rome, du soin des pauvres, ceux-ci ressortissant à sept diaconies ou régions, instituées par le pape Fabien (Liber pontif., t. I, p. 148) et groupées autour de sept églises déterminées. Ces diacres, les diaconi regiuitarii, sont à distinguer d’autres, plus nombreux, qui leur furent adjoints dans la suite, avec la qualification de statiunarii, et qui n’avaient comme tels aucune église à administrer, mais dans les rangs desquels se recrutaient habituellement les regionarii. Ceux-ci, par leurs relations nécessaires et constantes avec la personne du pape, acquirent naturellement une très réelle influence dans ses conseils et un grand prestige aux yeux du public, et ils devinrent ainsi. à la longue, les cardinaux-diacres. Mais même sous cette nouvelle dénomination, leur nombre septénaire fut d’abord maintenu. Ce n’est qu’au xi’= siècle que ce nomljre fut doublé, en même temps <|ue l’était celui des diaconies, j)ar suite de la multitude toujours croissante des nécessités auxquelles il fallait subvenir. Peu après, il fut i)orté à dix-huit. Ce chilFre. d’après Maiullon, avait déjà été atteint, sinon dépassé, sous HoxoRirs II (1 124-1 130) ; mais Sixte-Quint, en 1586, le ramena à quatorzc, et cette règle est encore observée de nos jours.

Le Liber poiiti/icalis, ibid., p. 122, rapporte aussi que Clet, qui fut le second successeur de Pierre, aurait, du vivant même et sur l’ordre de celui-ci. ordonné vingt-cinq prêtres, à qui Evariste aurait ensuite distril>uc les églises paroissiales, //v/V/., p. 126. Il est, en tout cas, certain que, de bonne lieure, le pape eut besoin de nombreux assistants ou sup pléants pour ses fonctions sacerdotales. Parmi les prêtres qu’il dut s’associer, les uns s’acquittaient de leur ministère dans l’église même du pontife et, pour ainsi dire, sous ses yeux ; aux autres étaient assignées diverses églises, qui prirent la dénomination de titres, tituli. Suivant l’auteur du Liber pontificalis, t. I, p. 164, le pape Marcel en aurait institué vingt-cinq. Au concile du 1*" mars ^99, les prêtres romains signent avec l’indication des vingt-cinq titres auxquels ils étaient attachés. Ces titres se multiplièrent et acquirent de riniportance. Au xii’siècle, il y en avait certainement vingt-huit. Cf. Jean Diacre ijiiniur), De Ecclesia Luterancusi, P. /.., t. CXCIV. col. 155^, et SoLLERius, Acta Satictorum, Junii, t. VI, p. xlvi. On peut même remonter un siècle plus haut, car la Descriptio sanctuarii Lateranensis, de la lin du xi* siècle, contenait déjà le passage de Jean Diacre svir les vingt-huit prêtres titulaires des principales églises de Rome. Ceux-ci en vinrent peu à jieu à exercer sur les églises voisines une sorte de juridiction épiscopale. Distribués en quatre catégories, ils dépendaient directement des quatre grandes églises patriarcales et, par leur intermédiaire, ils se rattachaient tous à la basilique de Latran, la Mater et magistra oianium Ecclesiarum, le cardo totius iirbis et orbis. Comme les diacres dont il a été question, ils étaient dits cardinaux, cardinales. Ils sont devenus nos cardinauxprêtres.

Ajoutons qu’aux réunions du presbytère romain on vit fréquemment, dès les premiers temps, se mêler les évêques étrangers qui se trouA’aient par hasard à Rome, amenés par le désir soit de rendre leurs tlevoirs au successeur de Pierre, soit de recourir à sa direction suprême. Les sources historiques mentionnent clairement le cas déjà sous le pontificat dç saint Corneille (261-253). Bientôt la coutume s’introduisit d’inviter à ces assemblées les évêques des cités les plus voisines. Leur présence, ajoutée à celle des prêtres et des diacres url)ains, finit par constituer dans la ville des papes une sorte de petit concile plus ou moins permanent, une manière de tî^koSî ; jvô/ ; / » ! ^ ? ! /., analogue à l’organisme connu et fonctionnant sous ce nom à Constantinople. De là à ranger les évêques

« suburbicaires » au nombre des conseillers ordinaires

du pontife suprême, à en faire des membres de son sénat, des cardina ux-éi-èques, il n’y avait qu’un pas, et, avec le temps, ce pas fut accompli.

III. Situation spéciale des carihnaux romains. — De la similitude d’origine et de ce que le nom de cardinal a été, à une certaine époque, attribué également au haut clergé romain et au liant clergé des autres villes, on aurait tort de conclure, comme l’a l’ait MuRATORi, qu’à ce nom répondaient, dans l’un et l’autre cas, des prérogatives identiques. Si pareille déduction était fondée, il faudrait retendre bien au delà de ces limites, puisque, ainsi que nous l’avons constaté, même des églises rurales, du moins avant le VIII’siècle, avaient leurs clerici cardinales. D’ailleurs, l’appellation de pape se donnait jadis indistinctement à tous les évêques, et il n’est jamais venu à l’esprit d’aucun catJiolique de les mettre tous, pour cette raison, sur le même rang. Ainsi en va-t-il du nom de cardinal : il était d’abord générique, indéterminé, n’impliquant nul rôle précis, nulle obligation ou puissance uniforme ; sa valeur exacte se déterminait suivant les circonstances. Les cardinaux d’un diocèse particulier autre que celui de Rome n’ont jamais pu recevoir de leur évê(iue et partager avec lui qu’un pouvoir renfermé dans les bornes de ce diocèse ; mais les dignitaires associés par le souverain pontife à l’administration des aflaires qui lui incombent acquirent par là même, naturellement et