Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/568

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

1119

DIVORCE

1120

voulut entourer le procès de toutes les garanties requises ; en septembre lôgg, il délégua trois commissaires, le cardinal de Joyeuse, le nonce de Paris et rarclievêque d’Arles, pour connaître de la cause en France : 1e 17 décembre, après une sérieuse enquête, ceux-ci admirent la validité des raisons présentées par Henri IV et Marguerite, — défaut des dispenses nécessaires, défaut de consentement d’une des parties, — et déclarèrent leur mariage nul. Le 25 avril 1600 fut signé, à Florence, le contrat de mariage d’Henri avec Marie de Médicis.

(Les détails sur le procès se trouvent dans les Lettres du Cardinal d’Ossat, t. III, p. 38^ sq., 403 sq. Amsterdam, l’joS. Cf. Degert, Le Cardinal d’Ossat, p. 2^4 sq. Paris, 189^ ; Poirsox, Histoire de Henri I t. II, p. 543 sq. Paris, 1864.)

5° Napoléon I^*" et Joséphine (1909 sq.). — Le 9 mars 1796, Napoléon Bonaparte s’était uni, par un mariage purement civil, à Joséphine Tascher de la Pagerie, veuve du général de Beauharnais. Le mariage fut stérile ; à mesure que la fortune de Bonaparte s’affermissait, ses frères le poussaient à un divorce qui lui permettrait une union féconde. Joséphine, qui se rendait compte de la campagne menée contre elle, profita du Aoyage du Pape Pie YII à Paris, à loccasion du sacre, pour lui révéler sa situation ; Pie VII fit entendre à Napoléon qu’il se refusait à la cérémonie du sacre, à moins que les deux souverains n’eussent auparavant reçu la bénédiction nuptiale. Après une explosion de colère qui montrait que dès lors il avait des projets, l’Empereur céda, par crainte du scandale ; la veille du sacre, le cardinal Fesch, prévenu par son neveu, se munit auprès du Pape

« de toutes les dispenses qui lui devenaient quelquefois

indispensables pour remplir les devoirs de grand aumônier » ; il maria ensuite Napoléon et Joséphine sans témoins, vers 4 heures de l’après-midi, dans les appartements privés des Tuileries (le"" décembre 1804). Le cardinal remit, quelques jours après, sur sa demande, à Joséphine, un certificat de la bénédiction nuptiale, et dut subir, à la suite de cet acte, une scène a iolente de son impérial neveu.

Dès 1807, Napoléon semble avoir pensé sérieusement au divorce, une liste des princesses d’âge nubile dans les différentes cours européennes fut alors dressée par son ordre. Un projet d’union avec la grandeduchesse Anne, sœur du tzar Alexandre, échoua à cause des exigences de la cour de Russie, qui eût voulu l’engagement formel que le royaume de Pologne ne serait jamais rétabli ; Napoléon fixa son choix sur l’archiduchesse d’Autriche Marie-Louise. Mais l’Empereur François II n’accorderait sa fille qu’après la dissolution canonique du mariage religieux avec Joséphine, dont il avait connaissance. Après l’émouvante scène du 15 décembre 1809, où Napoléon et Joséphine déclarèrent, dans une assemblée de famille, se séparer volontairement, « l’un et l’autre glorieux du sacrifice fait au bien de la patrie », après le sénatus-consulte du 16 décembre, qui déclarait le mariage dissous, et réglait le rang et la situation de Joséphine, l’Empereur pensa donc aussitôt à faire annuler sa première union par l’autorité ecclésiastique. Le mariage des princes était une de ces causes majeures qui, d’après les traditions mêmes de l’Eglise gallicane et les précédents historiques, relevaient du Souverain Pontife. Mais Pie VII était alors prisonnier à Savone par l’ordre de l’Empereur ; et d’ailleurs la fermeté avec laquelle il avait refusé de déclarer nul, en 1806, le mariage de Jérôme Bonaparte avec Elisabeth Patterson, laissait peu d’espoir de succès si l’on s’adressait à lui. Napoléon se résolut donc à confier sa cause, < ; omme celle d’un simple particulier, à l’officialité de

Paris, rétablie depuis le Concordat. Le 22 décembre 1809, l’ofRcial elle promoteur de Paris, mandés par Cambacérès, que l’Empereur avait chargé de poursuivre cette affaire, apprirent les volontés du Maître. Ils essayèrent de se dérober à la responsabilité qui les menaçait, en faisant observer que la cause n’était pas de leur compétence, mais de celle du Pape ; l’avis de la commission ecclésiastique alors réunie à Paris, et qui comprenait plusieurs évêques, fit taire leiu-s scrupules, et le 6 janvier 18 10 l’enquête commença. Cambacérès faisait valoir, au nom de l’Empereiu*, deux motifs de nullité contre l’acte du i^"’décembre 1804 : « la bénédiction nuptiale départie à Leurs Majestés n’a été précédée, accompagnée, ni suivie des formalités prescrites par les lois canoniques et par les ordonnances, non plus que des conditions essentiellement nécessaires pour constituer un mariage valable. Le vice radical du mariage que nous vous dénonçons est le défaut de lien, résultant de l’absence d’un consentement mutuel, que l’on doit considérer comme la cause et le résultat des circonstances qui l’ont accompagné ». Les témoins entendus furent le cardinal Fesch, Berthier, Duroc et Talleyrand. Fesch, après avoir fait le récit reproduit plus haut, ajouta que deux jours après le mariage l’Empereur lui avait déclaré « que tout ce qu’il avait fait n’avait d’autre but que de tranquilliser l’Impératrice et de céder aux circonstances ; qu’au moment où il fondait un Empire, il ne pouvait pas renoncer à une descendance en ligne directe ». Berthier, Duroc et Talleyrand afiîrmèrent

« avoir eu plusieurs fois l’occasion d’entendre

dire à Sa Majesté qu’il n’avait pas voulu s’engager, et ne se croyait nullement lié par un acte qui n’avait ni le caractère, ni les solennités prescrites ».

Le 9 janvier 18 10, l’alibé Rudemare, promoteur, déposa ses conclusions ; il prétendit plus tard qu’elles avaient été approuvées de plusieurs théologiens, parmi lesquels M. Emery. Il renonçait à l’argument tiré du défaut de consentement, n’osant pas faire valoir, disait-il plus tard, « en faveur d’un homme cpii nous fait tous trembler, un moyen de nullité qui ne fut jamais invoqué utilement que pour un mineur surpris ou violenté ». En revanche, il admettait que l’absence du propre curé et des témoins, requis par le Concile de Trente, rendait nulle l’union célébrée par le cardinal Fesch. Sans doute, celui-ci avait obtenu du Pape les dispenses nécessaires à l’exercice de sa charge de grand aumônier, mais « n’ayant pas particularisé, et nominativement spécialisé, les fonctions extraordinaires et curiales qu’il allait exercer auprès de Sa Majesté, il n’avait pu recevoir, et n’avait reçu, ni la dispense des témoins, ni le pouvoir de se substituer au curé ». L’Official de Paris, l’abbé Boilesve rendit en conséquence, une sentence par laquelle « vu la dilTiculté de recourir au chef visible de l’Eglise, à qui a toujours appartenu de fait de connaître et de prononcer sur ces cas extraordinaires », il déclarait nul et de nul effet le mariage contracté entre l’empereur et roi Napoléon, l’impératrice et reine Joséphine, et les prononçait libres de cet engagement, avec la faculté d’en prendre un autre. Appel fut immédiatement formé par le promoteur Rudemare à l’officialité métropolitaine, « attendu que M. l’Otlicial, qui a jugé selon sa sagesse, n’en a pas moins jugé contre la pratique ordinaire des tribunaux en pareil cas ». Le 1 1 janvier 1810, l’Oflicial métropolitain, l’abbé Lejeas, vicaire général capitulaire et administrateur de l’archevêché de Paris, rejeta l’appel, et admit, en plus du motif qu’avait accepté l’ofiicial diocésain, celui tiré du défaut de consentement ; Napoléon avait exigé cette insertion dans la sentence ; Lejeas obtint en récompense l’évêché de Liège, et s’y comporta en parfait courtisan. Le 14 janvier, le Moniteur, par