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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/637

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ÉGLISE (CHRÉTIENTÉ PRIMITIVE)

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le troisième intéresse la préparation de l’avenir : c’est la succession apostolique.

a) Juridiction apostolique

Dans chaque Eglise locale, l’apôtre fondateur apparaît non seulement comme pouvant marquer authentiquement la doctrine qu’il faut croire, mais comme pouvant imposer, en outre, les préceptes qu’il faut suivre ; comme poiivant cliàtier les rebelles ; comme pouvant déléguer ses atliibulions. — Donc, dans chaque Eglise locale, l’apôtre fondateur apparaît comme investi du pouvoir de juridiction.

Cette autorité, à la fois enseignante et gouvernante. est exercée par les apôtres en vertu même de leur fonction apostolique, en vertu de la mission divine qu’ils tiennent de Jésus-Christ. (Act., xx, 28 ; Gal., i, II ; I Cor., X, I ; Il Cor., x, 8-1 1 ; xi, 5 : xii, 11, 12 ; xni, 2 ; Bom., xv, 15. 16 ; I Tini., II, 7 ; Il Tim., i, 1 1.)

Le droit qu’a l’apôtre de commander et de punir s’affirme principalement dans les deux Epîtres aux Corinthiens. Le droit de déléguer et de transmettre le pouvoir spirituel s’allirme principalement dans les trois Epitres pastorales. (On utilisera plus loin ces dernières, à propos de la successioji apostolique.) Contentons-nous de résumer ici les Epîtres aux Corinthiens et d’y indiquer les passages affirmant l’autorité gouvernante de l’apôtre.

Première aux Corinthiens. — Paul a le droit de commander aux chrétiens de Corinthe ; il a le droit de les encourager ou de les punir, selon leurs mérites (iv, 14-21). Sentence pénale contre rincestueux(v, i-j). Concession d’un privilège au point de vue du mariage (vil, 10-16). Prescriptions liturgiques et disciplinaires (x, 16-21 ; XI, 18-34). Contrôle sur les charismes et règles assignées à leurs manifestations (xii, i-31 ; xiii, i-.’ig).

Seconde aux Corinthiens. — Affirmations catégoriques et itératives du pouvoir que l’apôtre Paul tient de Dieu sur l’Eglise de Corinthe. Droit d’imposer des prescriptions. Droit de châtier les transgresseurs (x, 1-18 ; xiii, 2).

Ces textes suffiront à mettre en relief la juridiction apostolique, s’exerçant dans chaque Eglise locale.

b) Unité du corps social

L’ensemble des fraternités chrétiennes, — l’Eglise du Christ, — ne constitue pas une simple unité idéale, d’ordre purement spirituel et mystique. Mais elle constitue, en outre, une véritable unité sociale, résultant de la communauté de régime extérieur.

( « ) Le Temple, le Corps, lEpousedu Christ. — Trois métaphores sont employées par saint Paul pour désigner l’Eglise universelle.

Temple du Christ. — Dans les Epîtres aux Corinthiens, cette image était employée pour désigner chaque àme chrétienne, ou encore l’Eglise locale de Corinthe (I Cor., iii, 9-17 ; vi, ig ; I Cor, , vi, 16). Dans l’Epître aux Ephésiens, la même image est employée pour désigner l’ensemble des chrétiens, l’Eglise universelle, dont le Christ est la pierre angulaire, dont les apôtres et les prophètes constituent les fondations, et dont les fidèles eux-mêmes sont les pierres vivantes (Eph., 11, 14, 19-22. Cf. I Petr., 11, 4-6).

Corps du Christ. — Dans la première aux Corinthiens, cette image était employée pour désigner l’étroite union des (idèles qui se nourrissent tous de la même Eucharistie (I Cor., x. 7), et pour désigner pareillement la solidarité entre chrétiens ayant à remplir des fonctions diverses : comme dans l’apologue de Menenius Agrippa, chaque membre doit contribuer, selon sa destination propre, au bien général du corps entier (I Cor., xii integr. Cf. Ilom., xii,

4-2 1). Dans les Epîtres aux Ephésiens et aux Colossiens, la même image est employée pour désigner l’ensemble des chrétiens, l’Eglise universelle : grand corps mystique dont Jésus-Christ est la tête, le chef ; dont tous les fidèles, juifs ou gentils, grecs ou barbares, sont les membres, et c’est le même Esprit du Christ, c’est la même vie du Christ, qui anime et qui rassemble intimement le chef et les membres (Eph., i, 22^ 23 ; IV, 3-16 ; Col., i, 11, 19 ; 11, 19).

Epouse du Christ. — Dans la seconde aux Corinthiens, cette image était employée pour désigner l’àme de chaque fidèle s’unissant au Christ (Il Cor., XI, 2). Dans l’Epître aux Ephésiens, la même image est employée pour désigner l’ensemble des chrétiens, l’Eglise universelle, que le Christ a aimée, que le Christ est venu épouser, que le Christ veut orner de la plus riche parure de grâce pour la rendre sainte et immaculée (Eph., v, 22-33).

Que le mystère de l’Eglise universelle, temple du Christ, corps du Christ, épouse du Christ, comporte l’unité spirituelle, mystique, invisible de la grâce sanctifiante et de la charité divine, on ne peut en douter. Cette doctrine de saint Paul est féconde en conséquences dogmatiques. Mais, pour l’Apôtre, l’Eglise universelle, temple, corps, épouse du Christ, comporte également un aspect extérievir et visible, un caractère de communauté sociale.

Saint Paul considère ici les chrétiens comme étant dans l’état de grâce où chacun doit vivre. Mais c’est bien à l’ensemble des chrétiens, au peuple fidèle du monde entier qu’il pense, en le désignant sous les noms de temple du Christ, de cor^s du Christ, d’e^OHse du Christ. C’est une collectivité d’hommes, un groupement visible, qu’il entend par le mot Eglise, quand il parle de l’Eglise universelle comme quand il parle de V Eglise de telle ville ou de telle région.

Il distingue : « un seul corps et un seul Esprit >> {Eph., IV, 4) ; ce qui suggère la notion d’un élément visible uni à l’élément invisible. Il caractérise le corps du Christ, qu’est l’Eglise, par « un seul baptême » (Eph., IV, 5) ; c’est-à-dire par le rite visible d’introduction dans la communauté sociale des chrétiens. Il parle également d’  « une seule foi » (Eph., iv, 5) ; ce qui, dans la pensée bien connue de saint Paul, suppose le magistère enseignant des pasteurs de l’Eglise (Eph., , 11, 12) : autoiùté doctrinale qui remédiera aux fantaisies de l’inspiration individuelle, qui empêchera les chrétiens de voltiger à tout vent de doctrine et de succomber aux pièges subtils de l’erreur (Eph., IV, 14).

L’Eglise universelle n’est donc pas un corps exclusivement mystique : elle est également un corps social hiérarchique. Son aspect visible deviendra de plus en plus incontestable avec ce qui nous reste à dire sur l’unité du régime extérieur dans la grande communauté des Eglises apostoliques de tout le monde gréco-romain.

(fi) L’unité du régime extérieur. — Il n’ya pas seulement magistère et juridiction de chaque apôtre sur les Eglises locales que lui-même a fondées. Mais il y a magistère et juridiction do tout le collège apostolique (les Douze et ceux qui leur sont régulièrement assimilés, comme saint Paul), sur toutes les Eglises chrétiennes à la fois. Bien que les circonstances providentielles de la première fondation du christianisme aient rendu moins nécessaires et moins fréquentes (à cette ép<)<iuc d’apostolat dispersé), les manifestations de la communauté de gouxernement ecclésiastique, on constate suffisamment l’unité du régime extérieur dans l’Eglise universelle.

Par exemple, le décret sur les observances mosaïques est pronnilgué à Jérusalem, par les chefs de l’Eglise, comme une règle qui s’impose, non seulement