Aller au contenu

Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/858

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

1699

ÉVANGILES CANONIQUES

1700

tiques, Introduction, chap. iii, iv, et v), il est n^anil’este que cette dernière étude a, dans son travail, comme dans celui de son prédécesseur, suivi la première, qu’elle dépend de la première, qu’elle ne fait qu’utiliser les résultats censés obtenus par la critique interne des textes ; et il n’est pas moins clair que celle-ci est gouvernée avant tout par le parti pris d’exclure de l’histoire tout ce qui implique franchement le surnaturel ou pom-rait y conduire.

Il y a donc, entre les diverses parties de l’œuvre de M. Loisy et celles du travail de Strauss, une correspondance exacte. La longue analyse de l’histoire évangélique, qui remplit la Vie de Jésus du docteur Strauss, a son pendant dans le Commentaire détaillé que M. Loisj- donne des Synoptiques ; la synthèse de l-a. Nouvelle vie de Jésus, dans la longue Introduction mise en tête de ce Commentaire. Dans cette Introduction même, ce que le critique français dit de lu Carrière et de VEnseignement de Jésus, d’après les Evangiles synoptiques (chap. vii, a’iii, ) correspond à la I" partie du second ouvrage de Strauss, intitulée Esquisse historique de la vie de Jésus ; ce qui est dit du Caractère et du développement de la tradition évangélique (chap. vi), correspond à la II’partie de la Nouvelle vie de Jésus, intitulée le mythe ; enfin, ce ([ui regarde l’Origine et la composition des trois Synoptiques (chap. I, iii-v) correspond k l’Introduction de Strauss sur les Evangiles comme sources de la vie de Jésus.

Mais M. Loisy ne s’est pas borné à emprunter au professeur de Tubingue son cadre, il en a adopté aussi largement l’esprit et les idées. C’est la même manière d’apprécier l’historicité des faits évangélicjues d’après lem- rapport avec le surnaturel ; et c’est aussi la même rigueur à appliquer l’hypothèse de l’idéalisation légendaire, dans une mesure que réprouvent le plus grand noml^re des critiques indépendants.

S16. Son appréciation touchant l’origine et l’historicité des Synoptiques. — Toutefois, en ce qui concerne l’ancienneté des Synoptiques et leur rapport mutuel, M. Loisy ne pouvait s’en tenir simplement aux positions du Aieux critique allemand. D’après Strauss, la rédaction définitive de nos Evangiles ne serait guère antérieure au milieu du ii" siècle ; le plus ancien serait celui de Matthieu ; le plus récent, celui de Marc, simple abrégé des deux précédents. Ces hypothèses ne sont plus aujourd’hui soutenues de personne. M. Loisy n’a pu que se ranger, sur ces divers points, à l’opinion communément reçue parmi les critiques indépendants, à savoir que nos Synoptiques sont tous les trois du i" siècle (n° 32), que Marc n’est pas un abrégé des deux autres, mais est, au contraire, le plus ancien, et a été utilisé lui-même par les deux plus récents (n° 59).

Povu" assurer, malgré tout, la possibilité du recours nécessaire à l’hypothèse mythique, M. Loisj’, fidèle à l’esprit de Strauss, tâche de placer le plus grand écart possible entre les témoins autorisés de la première tradition évangélique et la composition de nos documents, La rédaction du second Evangile est rapportée approximativement à l’an’j5 ; celle des deux autres aux dernières années du i" siècle (n°38). Aucun d’eux ne serait d’un apôtre, ni d’un disciple direct des apôtres, ou d’un homme qui aurait eu souci de recueillir le témoignage certain de ceux qui avaient vu et entendu le Seigneur (n" 61, 68, 106). Dès lors, entre les faits évangéliques et les écrivains qui prétendent les rapporter, on retrouve une distance un peu analogue à celle que Strauss supposait, et l’on peut s’en autoriser pour reprendre les hypothèses niêmes qu’émettait le professeur de Tubingue, touchant la formation graduelle du mythe. Le grand

travail d’idéalisation que l’auteur de la Vie de Jésus croyait devoir prolonger jusque vers l’an 150, doit trouver sa i)lace entre l’an 30, date de la mort du Sauveur, et le dqji-nier quart du i" siècle.

Pour M. Loisy, comme pour Strauss, les Evangiles sont donc « avant tout, des livres d’édification » où le critique doit démêler « ce qui est souvenir primitif de ce qui est appi’éciation de foi et développement de la croyance chrétienne ». Autour d’un petit livre, 1908, p. 44- Ce sont des écrits de propagande où s’est cristallisé ce qui a formé la tradition apostolique, et qui n’a été autre chose qu’une « élaboration constante et progressive des impressions reçues et des souvenirs gardés » Les Evangiles synoptiques, t. I, p. 175. Même dans Marc, le plus ancien de nos Evangiles, ce que l’on trouve est « un résidu plus ou moins hétérogène de la tradition historique de l’Evangile et des interprétations, des corrections, des compléments, qu’y avait introduits le travail de la pensée chrétienne, soit le travail anonyme de la foi dans les premières communautés, soit l’inlluence individuelle de maîtres tels que Paul, soit les ré- 1 flexions personnelles des rédacteiu"s évangéliques ». Ibid., ]). 112, cf. p. 141, 172.

51 7. Les interprétations rationalistes concernant les points qui, dans les Evangiles, intéressent particulièrement la foi. — Pour mieux connaître l’attitude des rationalistes relativement au contenu surnaturel des Evangiles, et pouvoir la critiquer plus eflicacement, il y aurait avantage à exposer ici, avec quelque détail, les positions qu’ils ont prises à l’égard des principaux points qui, dans nos documents, intéressent la foi. Ce sont : la conscience et la manifestation messianiques de Jésus ; les miracles, preuves de sa mission ; la prévision qu’il a eue de sa mort et l’oflrande qu’il en a faite en sacrifice ; sa résurrection corporelle ; sa divinité proprement dite ; enfin sa naissance virginale.

Le trop de place que demanderait cet exposé dé^ taillé nous oblige à renvoyer aux articles spéciaux du Dictionnaire. On le trouvera au complet dans la Bévue pratique d’Apologétique du i"septembre 1910, ; t. X, p. 815-842.

2. — Critique générale de l’interprétation rationaliste des Evangiles

518. 1" D’une façon générale, la critique rationaliste de l’historicité des Evangiles est commandée par le préjugé. — Du simple exposé des théories i-ationalisles, il ressort clairement que le procédé par lequel les critiques soi-disant indépendants discernent et éliminent les éléments non historiques des Evangiles est essentiellement arbitraire, gouvcrné par le préjugé philosophique, nullement par un examen objectif des garanties de A’érité que possèdent nos documents.

L’a priori est évident chez les représentants de la critique radicale, tels que Strauss et Loisy. Ils ont beau placer en tête de leurs ouvrages l’étude de l’origine et de la valeur documentaire des Evangiles, il est clair que leur appréciation de l’histoire et leurs conclusions touchant le travail mythique qui s’est exercé autour d’elle ne découlent pas de constatations impartiales faites d’abord sur les documents, mais résultent du ])artipris. La preuve en est que M. Loisy, tout en ayant, sur l’origine de nos Synoptiques, des idées très dill’érentes de celles de Strauss, et tout en tenant, par exemple, l’Evangile de saint Marc pour le plus ancien et celui qui servirait de fond narratif aux deux autres, tandis que d’après Strauss c’était le plus récen t et un simple abrégé des deuxpremiers, émet