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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 2.djvu/259

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HOMME

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licalioii iiiicise de plusieurs des détails qu’elle nous conserve. Mais un certain flottement des limites n’empcclie pas le noyau révélé de se dessiner avec certitude ; on peut allirmer sans hésitation de plusieurs vérités qu’elles nous sont y : aranties par la Bible. Or dans ce nombre figurent les deux propositions suivantes, qui nous intéressent :

a) Dieu a créé immédiatement l’âme du premier homme, et probablement remanié tout à nouveau la matière destinée à former son corps.

Il) Le genre humain descend tout entier d’un seul couple (monogénisme que réclamerait à elle S(’ule la doctrinedupéché originel). [Voir les articles Genèse, riic.uii ORIGINEL, Transformisme.]

Pour ces multiples raisons, nous conclurons au rejet nécessaire d’un évolutionnisme qui, sou<lant l’homme, par toute l’épaisseur de son être, au. formes inférieures de la vie ou à la matière, ne verrait en lui que le produit d’une transformation, — soit du même au même, par remaniement des combinaisons primitives, — soit du moinsau plus, par des accroissements (fussent-ils dus à une source divine), que ne terminerait pas un remaniement brusque et profond, un arrachement au courant commun, plaçant l’Humanité dans une région de transcendance et de stabilité. — Qu’on ne juge pas ces restrictions tyranniques. Ici, encore et surtout, il y aurait beaucoup à dire sur les latitudes très grandes laissées à la pensée, et sur le domaine spécial où peuvent se vérilier les principes transformistes. Nous en reparlerons plus loin, en traitant des « apparences «. Qu’il surtise pour l’instant d’avoir marqué certaines bornes indispensables aux fantaisies de notre esprit.

Et maintenant que se trouvent lixés les principaux points parlesquels est assujettie à passer toute représentation orthodoxe de la nature humaine, montrons que ce tracé n’est pas contredit, mais confirmé, ou au moins toléré, par la philosophie naturelle et l’expérience.

II. — L’Homme, d’après les conclusions de la Philosophie et des Sciences

L’intuition des choses en soi nous manque, et nous ne percevons directement que des apparences. Mais ceci même a lieu de deux façons très diverses. — Tantôt en elîet notre vision est intérieure aux objets et nous les révèle par le dedans : c’est le cas de nous-mêmes par rapport à nous-mêmes. — Tantôt, au contraire, nous appréhendons lesêtresdu dehors, par une vue superûciellequi ne nous fournit sur leur conscience que des indices plus ou moins équivoques ; c’est ce qui a lieu pour toutes les monades qui ne sont pas la nôtre. Un homme qui me parle, un animal dont j’observe les allures, me sont, dans leurs expériences internes, imjiénétrablcs. Et ainsi, tout intérieur qui n’est pas le mien, je ne le connais que par analogie avec moi-même, — très confusément, si entre lui et moi la ditTérence des natures est un peu profonde.

Nous allons étudier l’homme en utilisant l’un et l’autre de ces modes d’investigation. Nous retirant d’abord au fond de nous-mêmes, nous analyserons le mécanisme et les éléments de notre vie interne, atin d’en déduire les propriétés de notre essence. — Puis, nous replaçant parmi les formes extérieures, nous nous regarderons mouvoir du dehors, comme l’une d’entre elles : et nouschercherons à accorder la connaissance précédemment acquise de notre être avec les apparences ainsi surprises.

La première méthode aboutissant à nous révéler notre être avec une sûreté et une profondeur émiiienles, nous l’utiliserons pour édifier des preuves en f.neur des conclusions que nous a fournies précé demment le dogme. A la seconde, plus exposée aux illusions de l’interprétation, nous rattacherons une brève étude des principales objections faites à la conception catholique.

I. — PUKUVES rationnelles

EN FAVEUR DE LA CONCEPTION CATHOLIQUE DE l’hoMMB

Ces preuves existent sûrement, au moins pour la spiritualité et la liberté (cf. la condamnation de Iîonnetty : Dbnzinger, Enciiir.>", n’1650[1506J). Seulement, il est bien des façons, diversement heureuses, de tenter la démonstration. Nous allons en esquisser une, en suivant à peu près, pour l’ordre des points à établir, les chefs de division adoptés dans l’exposition, au cours delà i" partie. [Pour jjlus de détails, voir Ame.]

A. — Nature de l’Homme considéré en soi-Mf ; ME,

— Le témoignage intérieur étant formel quant à ceci : nous sommes siège d’émotion et d’activité, au moins immanente ; — il reste, pour établir que l’homme est une substance, au sens que nous avons dit plus haut, à montrer : i° qu’il est une chose, et non un pur devenir, et 2° que cette chose doit se dire, — dans les traits qui la font « nature humaine », — achevée et définitive.

Le premier point peut se démontrer à partir de la simple intuition que chacun de nous a du cours de son existence. Raisonnons sur la notion de continu successif, dont un exemple nous est fourni par la série de nos états d’àine ; analysons la nature du changement réel et concret : nous nous verrons forcés, pour en rendre compte, d’opérer dans l’être qui change, — et en nous-mêmes par conséquent, — la distinction entre un élément qui demeure et un autre qui passe, entre une chose et ses modifications transitoires.

Soit en effet cet être pris dans deux états immédiatement successifs. Il faut dire : entre ces deux états, ou bien il n’y a rien de commun, ou bien, de l’un à l’autre, quelque chose passe. — Supposons que rien ne passe ; dans ce cas : — ou bien le mouvement n’est pas un vrai continu, mais un multiple que rien ne relie, un perpétuel recommencement ; et ceci va contre l’hypothèse ; — ou bien il faut, pour donner quelque cohérence à la série des éléments temporels, imaginer l’existence d’un principe d’unité diffus dans toute la durée du changement. Mais ceci est inconcevable. — Sans doute, j’ai bien l’idée de ce qu’est un être étalé dans l’espace ; je vois des objets étendus, dont aucun i>oint n’est le tout, et qui reposent, en quelque façon, sur leur continuité tout entière. Mais je n’arrive pas à transporter cette conception dans la durée ; mon esprit se refuse à voir un être étiré dans le temps, un continu temporel tenant i)ar son bloc, grâce à un effet d’ensemble. C’est que le temps est successif ; il surgit à mesure, par fractions indépendantes ; à pouvoir lui donner la cohésion cpii l’empcche de tomber en poussière, il ne saurait y avoir qu’un sujet relativement, au moins, immuable, donné tout entier à la fois, capable par suite de recueillir un à un les instants et de les synthétiser sur son identité.

Donc, sous les diverses phases de tout changement, quelque chose de commun se retrouve ; quelque chose passe : l’être qui dure n’est pas constitué par la seule chaîne de ses états, comme si évoluer était une manière d’être primitive ou simple ; il est un complexe, où la raison doit faire deux parts : du mobile, et du fixe, — ce fixe n’étant pas seulement une identité de surface, une apparence extérieure qui persiste, comme est la forme d’un jet ou d’une flamme, ou