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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 2.djvu/592

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JANSENISME

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conclure l’affaire, et M. de Lyonne insistait fort pour qu’on en flnil. Sa Sainteté croyait qu’il pressait ainsi de la part même du roi ; elle jugea donc pouvoir, sans imprudence, se lier à la lettre des quatre évêques, aux assurances de son nonce et à celles de Vialart, qu’Arnauld contirmait. Sans nul doute, le Pape comprit que des réserves avaient clé formulées toucliant l’attribution des propositions au livre de J.nnscnius ; cependant il estima, c’est le cardinal Rospigliosi qui l’atteste, qu’il s’agissait du fait entendu dans l’acception romaine de l’intention personnelle de Jansénius, mais non pas dans celle du sens objectif de l’ouvrage. Comme, sur le premier point, l’Eglise n’exigeait rien de plus que le silence respectueux. Sa Sainteté n’approfondit point et se déclara satisfaite. C’est ainsi qu’elle accorda la paix. Plus lard, sur de nouveaux bruits, plus consistants encore, et sur le contenu des procès-verbaux entin connu. Clément IX s’enquil soigneusement. Il lit examiner les choses dans une congrégation de cardinaux. Ceux-ci blâmèrent la mauvaise foi des prélats, mais jugèrent qu’il valait mieux ne pas reprendre le fond du débat. Il sullirait que, dans son bref de réponse aux quatre évéques. Sa Sainteté aflirmàt qu’elle n’aurait jamais admis à cet égard ni exception ni restriclion quelconque, étant très attachée aux constitutions des papes ses prédécesseurs. C’est ce qui fut fait (19 janvier iG6g).

La conclusion sur le fait de Clément l. est donc que le Pape a été trompé, sinon tout à la fois par Louis XIV et Lyonne, par le nonce, les prélats médiateurs, Arnaubi et les quatre évéques. au moins par quelques-uns d’entre eux. Lyonne paraît le plus responsable. Probablement aussi, le roi et le nonce ont été joués, mais Bargellini avait en quelque sorte bien voulu l’êtTe. s’étant par avance engagé à se cacher de ceux qui pouvaient voir clair, comme l’archevêque de Paris ou le P. Annat. Enlin, parmi ceux de l’autre camp, il y eut peut-être de même des dupes, Vialart par exemple ou l’un ou l’autre des quatre évéques. El ce qui facilitait cette duperie universelle, c’est que, de tous côtés, à Paris et à Rome, l’on était fatigué de disputer, et l’on soupirait après un accommodement. On redoutait tout retard et, pour ainsi dire, tout éclaircissement sur ce qu’il restait d’équivoque dans les termes.

Celte conclusion étant admise, on voit que le Pape, sur la question de fait prise dans son second temps, c’est-à-dire sur le point de l’autorité de l’Eglise dans la décision des faits dogmatiques, a toujours maintenu l’infaillibilité et n’a aucunement donné dans les vues des Jansénistes (Rapix, Mémoires, l. III, liv. xx.

— Histoire des cinq propositions, t. II, liv, vi. — FÉNRLON, Autre lettre au P. Quesnel louchant la relation du card nal Ilospigliosi, — en notant le témoignage de Valloni — du Vaucel — agent du parti à Rome (p. 433). — Boirlon, M. Vialart, étéque de Cliàlons. et la paix clémentine. L’auteur essaie de dégager la responsabilité du médiateur, lequel — selon lui — aurait de fait (d)lenu que les quatre évéques restreignissent leur distinction sur le fait à l’intention personnelle de Jansénius. Phis lard, leurs amis auraient abusé de l’ambiguïté des termes.

— CocniN, Etude sur Henri Arnauld, étéque d’Angers, dans ses rapports arec le funsénisme, dans Ecole nationale des Chartes. Positions des thèses soutenues par les étct’es de la promotion de 1907. Màcon, Prêtât, 1907, pp. 3--50. — " I.n Paix de Clément /.V).

G. La. siGNATrHE nu Foumilaire kt les RklirilRL’SKS DF PoBT-RoYAL. — En dépit des plaisanteries qu’on a faites, il y avait, la chose saute aux yeux, (les motifs sérieux d’exiger que les Religieuses de

Port-Royal souscrivissent le Formulaire. On avait toutes les raisons de douter de leur croyance. De 1 66 1 à 1661, elles avaient obstinément refusé la souscription qu’on demandait ; elles avaient seulement consenti à signer en général la comlamnation des propositions condamnées, Arnauld les avait encouragées et soutenues dans leur résistance : aidé de Nicole et de quelques autres, il était intervenu dans leur cause par toutes sortes de lettres et de mémoires, et il avait fait leur apologie [Dictionnaire des Jansénistes, art. Arnauld (Antoine), c. 267-270]. M. de PéréUxe, devenu archevêque de Paris, prit en main leur affaire : après plusieurs démarches et plusieurs mesures de rigueur, comme la dispersion des plus opiniâtres dans diverses communautés, il réunit, sous la direction d’ecclésiastiques de son choix et la garde exacte du lieutenant civil, les récalcitrantes à Port-Royal des Champs, séparé désormais de Port-Royal de Paris, et il mit le monastère en interdit. Peu après la paix clémentine, les religieuses remirent à l’archevêque une déclaration de soumission, dont il se contenta. L’interdit fut levé et l’absolution des censures accordée (18 février 1669). Dès lors, les deux Porl-Ptoyal demeurèrent désunis (Rapin, Mémoires, t. III, p. 25t>257 : 263-276 ; 297-324 ; 375-877 ; 485-48’J — Gaillardin, Histoire de /.unis A/I’, t. lU, p. 89-93 et 303. — * S.ixtk-Bfuve, Port-Royal, t. IV, liv. v). Nous louchons ainsi au terme de la seconde période du Jansénisme, l’époque que nombre d’historiens dépeignent comme grande et splendide, celle d’Arnauld et de Nicole, de Pascal, des solitaires et des Petites Ecoles, où finit la Mère.Angélique (-[- 6 août 1C61). — (Voir Gallia Clirisiiana, t. VII, c. 917-921. — * SAiNTE-BErvB, Port-Hoyal, t, IV, liv. v, p. 153 et suiv. ^ R.pix, Mémoires, t. III, p. 109-164.) Le grand.rnauld et son influence se retrouvent partout, dans les discussions sur le droit et plus lard, jusqu’à la veille sinon jusqu’au lendemain de la paix, dans les chicanes sur te fait, dans l’affaire des quatre évéques et dans ces négociations pour l’accommodement où, par une étrange aventure, il joue le rôle de médiateur en même temps i|ue de partie (Bri cher Jos., Arnauld, Antoine). Ce sont les beaux jours de la secte, durant lesquels les interminables contestations sur les cinq propositions et le sens de Jansénius, le fait et le droit, la grâce ellicace et la morale relâchée, sont menées avec un incontestable talent et parfois avec une réelle grandeur littéraire. Malheureusement, les brillants dehors de l’esprit et de la vertu dissimulent mal l’orgueil et l’obstination ; et l’on est surpris de voir ces chrétiensaustères, ces saints, comme donneraient à penser leurs nécrologes {.Xécrologe des plus célèbres Défenseurs el Confesseurs de la vérité, par l’abbé Cerveau, 7 vol. 1760-1778), ergoter sans lin, en résistant aux évidentes décisions de l’Eglise et en s’entèlant à prouver qu’ils sont, quoi qu’il paraisse, ses enfants sincèrement soumis.

IV. — La troisième période : le Quesnellismo (1671-1788).

.Après la paix de (.’.lément IX, les disputes sont suspendues, et Louis XIV tient la main à ce qu’elles ne recommencent pas (Edit du cnmp de.inoie, 30 mai 1676, rendu à l’occasion d’un mandement de l’évêque d’.Vngers, Henri.Vrnauld, du 4 "lai 1O76, lequel interprétait l’accommodement au sens de l.i distinction marquée dans les procès-verbaux, — et Circulaire de (^olbert aux intendants, 1677), En 1679, il prend des mesures contre l’ort-Royal trop fréquenté, en renvoie les pensionnaires et disperse les Messieurs. Les meneurs sortent alors de France.