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JUIF (PEUPLE)

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Elle témoigne, surtout dans les Psaumes, de la transcendance de Dieu. On dirait qu’en certains cas des étrangers affectent de l’employer comme pour garder, vis-à-vis des serviteurs de 'ïabweli, une sorte de neutralité (^"en., xiv, 18-22). Beaucoup plus obscure est la signilication de la locution '7 : , '/ SaJc/ay ( nsy) L'étyraologie en est incertaine. Déjà les Septante étaient hésitants quant à sa signilication. Dans la Genèse el l’Exode, tantôt ils la négligent, tantôt ils la rendent simplement par ©îcç, avec ou sans sullixe (Gen., xvii, i ; xlviii, 3 ; xlix, 25 ; £x., vi, 3 ; cf. Num., XXIV, 4, 16). Ailleurs on a : ziipio ; (Joh, VI, 4, l4 ; XIII, 3, etc.) ; ô T « -àvra -ncirvy-^ (Joh, VIII, 3) ; TTKvTszc'/iTwp (./oh, V, 19 ; très fréquenl) ; lr, ojp-J.vi'., i{Ps. Lxviii, l5) ; ôBiii « D mp^nii (^Ps. xc.i, i) ;

« yvj ; {.ioh, XXI, 15, etc.) ; la Vulgate traduit par

Ommpotens (cf. Ex., vi, 3). La traduction l’z'/.vo ; est d’une façon constante celle d’Aquila, de Symniaque et de Tliéodotion ; elle repose sur une étymologie très factice, qui était chère aux rabljins et qui décompose iadday en deux éléments : le relatif sa (ou.si-, que l’on rencontre à côté de sér), et le substantif (/av, sulfisance ( B'-|-n) : ce qui sullit. Il n’y a rien à tirer d'/s., xiii, 6, Jo., i, 15, dans le sens d’une racine sâdad : outre qu’en ces endroits, le prophète use du jeu de mots et de l’allitération, rien dans la tradition biblique n’invite à envisager Dieu comme le Destructeur. On a voulu (Nôldeke, Hoffmann) rapprocher adday corrigé en sêdnr, de s-e’rf, démon, ou, selon le sens de l’assyrien sédii, génie prolecteur ; on aurait ainsi : mon protecteur. Mais est-il probable qu’il faille songer ici à une épithète commune au vrai Dieu et aux fausses divinités ? On a pensé (Fred. Delitzsch, Gheyne) à une forme intensive en rapport avec le mot assyrien sadu, montagne, et avec une racine sâdnli (saday), être élevé. Cette étymologie aurait l’avantage d’aboutir au sens traditionnel adopté pour la locution El adday, qui implique la grandeur, la toutepuissance ; d autre part, cette appellation se laisserait rapprocher de certaines épitliètes de la divinité, fréquentes dans la Bible : 'élién, pierre (Gen., xlix, 2/1), séUi, rocher (Ps. xviii, 3), surtout sûr. rocher, forteresse (employé trente-trois fois dans la Bible pour désigner le Dieu d’Isracl : nent., xxxii, l, 15, 18, 31, 37, etc.). D’après Ex.. vi, 3 (P), El adday fut le nom soushMjuel Yahweh se manifesta aux patriarches. On le trouve, en effet, dans la Genèse (xvii. 1 ; XXVIII, 3 ; XXXV, 11 ; xLiii, 14 ; xlviii, 3 ; xi.ix, ily), mais aussi / ::., x, 5, etc. Il est remplacé simplement par Sadday dans lA’iim., xxiv, 41 '6 ; Itii., 1, 20, 21 ; /.s-., XIII, G ; Ez., I, 2/1 ; fo., 1, 15, etc. ; on le rencontre [)lus de trente fois sous cette forme dans le livre de.lob (v, 17 ; VI, 4, 14 ; etc.)

B. — Le deuxième nom commun est celui d’Elohim (O’n^K, liihiin) à côté duquelapparaît Elohah (ni'^K. lo’h). — a) Ce dernier mot rappelle le nom divin que l’on retrouve dans le monde arabe, Ilah, qui avec l’article devient Allah. Dans les documents préislamiqucs, on rencontre aussi une déesse liât ou ilahat, avec l’article.llat. Dans la Bible, le singulier l<Sh, qui n’est jamais accompagné de l’article, est d’un usage beaucoup plus rare que le pluriel ; tandis que l’on rencontre ce dernier environ deux mille cinq cent soixaiile-dix fois, la forme du singulier est employée cinquante-cinq fois ; on ne la lroue pas moins de i)uarante fois dans le livre de Job ; en dehors do ce livre, elle figure ou dans des textes poétiques, ou dans de la prose de basse époque (cf. pourtant le Ketih de II Ilef ;., xvil, 31). ' /o’A peut désigner un dieu étranger (II Chron., xxxii, 1.5 ; Dan., XI, 37). Alais le plus souvent il s’agit du Dieu d’Isracl, ou tout simplement de Dieu (Dent., xxxii, 15, 17 ; / «., xt-iv, 8 ; I/ali., iii, 3 ; Juh, iii, 41 etc. ;

Ps. xviii, 32 ; L, 22, etc. ; /"r., XXX, 5 ; Te/ ;., IX, 17). Le pluriel 'élohim, de même que 'élim, peut se rapporter à des êtres humains qui, par leur fonction, apparaissent comme les représentants de la divinité : chefs de peuples, juges (Ps. lxxxii, 1, 6) ; il désignera aussi les anges (Ps. xc.vii, 7), bien que d’ordinaire ils soient appelés h’iiêy 'lôhim, lils de Dieu. Il conservera son véritable sens numérique quand il exprimera une pluralité de dieux étrangers (Ex., XVIII, 11 ; XX, 23 ; XXII, 19 ; etc.). Mais bien plus ordinairement il s’agit du seul Dieu d’Isracl. Tantôt le substantif est accompagné de l’article, halvliim, parce que le Dieu d’Isracl est le Dieu par excellence ; tantôt il est sans article parce que le Dieu d’Isracl est Dieu tout court, aucun autre être ne méritant qu’on le désigne par ce nom. C’est donc par extension et par une sorte d’abus de langage que ce pluriel est employé pour désigner une fausse divinité, dieu ou déesse (.jiid., ix, 27 ; xi, 24 ; 1 Sam., V, 7 ; I /feg"., XI, 33 ; etc.). Quand il sert à désigner le vrai Dieu, lôhim se construit généralement avec des verbes et des qualificatifs au singulier (Gen., 1. i ;

I Sam., VI, 20 ; Neh., viii, 6 ; etc.). De tels usages grammaticaux ne sont pas absolument particuliers à l’hébreu : en assyrien le pluriel ilani, parfois employé pour désigner un seul être divin ou la divinité en général, se peut construire avec un verbe el des attributs au singulier (cf. Hehn, />ie hihlische luid die hahylonisclie Gottesidee, p. 160-173). — h) On a vu dans cet emploi d’un nom pluriel pour désigner le Dieu d’Israël une preuve évidente que les lils de Jacob avaient d’abord été poljthéistes. La Bible elle-même atteste que les ancêtres des Israélites, d’une manière plus précise les ancêtres d’Abraham, adoraient plusieurs dieux (Jos., xxiv, 2). Si le mot lôhim remonte jusqu'à cette date, il est tout indiqué qu’il ait servi à désigner les divinités de la tribu. Mais il est certain qu’appliqué au Dieu d’Israël, il a perdu de bonne heure toute connexion avec le polythéisme ; s’il y avait eu danger qu’il inspirât aux Israélites l’idée d’adorer plusieurs dieux, il eût été réprouvé et anathématisé par les propagateurs cl les champions du yahwisme. Si, mis en connexion avec le développement de la religion Israélite, ce terme peut évoquer des attaches polythéistes, c’est pour des temps que l’on peut qualitier de préhistoriques, ou bien des périodes de beaucoup antérieures à la constitution du peuple de 'V’aliweh En gardant ce terme, les Israélites auraient implicitement reconnu que la divinité unique à laquclleils rendaient leurs hommages réalisait pleinement le concept que leurs ancêtres avaient morcelé entre plusieurs personnalités divines. Ce pourrait être une explication historique de ce pluriel d’intensité que constitue le mot lôhim. Rappelons toutefois qu'à ce litre, il se rapproche de certains substantifs abstraits tels que

II lirim ( Dmj, o), jeunesse ; z’qiinim (Qi^pT), vieillesse. Il serait assez naturel que l’on eût employé le terme qui exprimait l’idée abstraite de divinité pour désigner l'être auquel seul elle convenait. — <) Au point de vue grammatical, lôhim se présente comme un pluriel très régulièrement formé iV’lô" !  ! dans lequel le li troisième radicale serait guttural (cf. gâ'"'"/', n~ : >, haut, ^'hiihim) ; c’est l’opinion de Kranz Delitzsch, qui songe à une racine (inusitée) 'alah et la rapproche de l’arabe 'aliha, qui évoque l’idée d’errer çà et là par suite de la crainte, de la terreur. Dieu, npparaîlrait avant tout comme l'être terrible, redoutable. On sait que Gen., xxxi, ! i, 53, il est appelé la Terreur d’Isaac, qu’ailleurs (/s., viii, 13 ; Ps. i.xxvi, 12) il est appelé môra', objet de crainte, qu’enlin la religion elle-même s’exprime par la formule crainte de Yahueh. Toutefois la rareté du