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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 3.djvu/103

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MARIE, MERE DE DIEU

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moines du désert, liorames de foi vive et de théologie plutôt courte. Le patriarche Cyrille ne put se dispenser d’intervenir. Il exposa la doctrine catholique sur la personne du Christ, dans son homélie pascale de l’année 42g ; il y revint dans une lettre adressée aux moines d’Ëg’ypte. Dans ces tlocuments, le nom de Nestorius n’est pas prononcé, mais sa doctrine est visée si clairement qu’il ne pouvait manquer de s’y reconnaître. Quand la lettre aux moines lui parvint, il éclata en invectives contre « l’Egyptien » ; les représailles suivirent de près. Tandis que deux de ses amis entreprenaient de réfuter Cyrille par écrit, lui-même accueillait les plaintes de trois clercs alexandrins condamnés par leur évêque pour des fautes graves, et manifestait l’intention d’évoquer leur cause à sa barre, comme évécfvie de la ville impériale. Cyrille crut le moment venu d’adresser directement des remontrances à Nestorius : il le somma de mettre fin, par l’acceptation loyale du 0£iTo.<î ; , à un scandale qui troublait toute l’Eglise ; Nestorius écarta la question par quelques lignes dédaigneuses. Cyrille revint à la charge dans une épître dogmatique. Nestorius répondit sèchement par l’exposition de sa propre doctrine, et engagea le patriarche d’Alexandrie à s’occuper de ses affaires. Il n’y avait rien à gagner avec cet homme opiniâtre : Cyrille se tourna vers Rome.

A cette date — printemps 430 — Rome voyait clair dans la pensée de Nestorius. Le pape avait eu tout le temps de faire traduire en lutin les pièces venues de Constantinople ; sa conviction fut encore affermie par le supplément d’information que le diacre Posidonius lui apporta d’Alexandrie. Au mois d’août, un synode se réunit à Rome ; l’enseignement de Nestorius fut condamné, non pas, comme il devait s’en plaindre plus lard, sur le témoignage de ses ennemis, mais sur un vaste dossier dont lui-même avait fourni la très grande part.

Nous n’avons pas les actes de ce synode, mais ses conclusions nous sont connues par quatre lettres pontiflcales datées du 1 1 août ^30 et notifiant à Nestorius lui-même, au clergé et au peuple de Constantinople, à Cyrille d’Alexandrie et à Jean d’Antioche, la sentence rendue. Mamsi, t. IV, 1026 sqq.

La lettre adressée à Nestorius est sévère. Le pape rappelle la grande réputation acf|uise autrefois par le patriarche de Constantinople, et si malheureusement compromise par son blasphème ; ses lettres pleines de bavardage et de tergiversations ; l’opposition irréductible qui existe entre la foi catholique et ces lettres, par lesquelles il s’est condamné lui-même ; il casse toutes les sentences portées par Nestorius contre ses opposants et lui enjoint, sous menace d’excommunication et de déposition, de rétracter ses erreurs dans les dix jours à dater de la notification qui lui sera faite par Cyrille d’Alexandrie, exécuteur de la sentence romaine.

Au clergé et au peuple de Constantinople, le pape dénonce la doctrine abominable de leur évêque, touchant la maternité de la Vierge et la divinité du Sauveur ; doctrine certifiée par les lettres mêmes signées de Nestorius et par le rapport de Cyrille. A Cyrille, le pape décerne de grands éloges pour avoir découvert les pièges d’une prédication artificieuse ; il lui communique l’autorité du Saint-Siège afin de procurer l’exécution rigoureuse du décret.

Ce ne fut pas par Cyrille d’Alexandrie que Nestorius reçut la première nouvelle du coup qui venait de l’atteindre. Une voix amie, celle de Jean, patriarche d’Antioche, lui apporta, au cours des mois d’automne, un avertissement et des conseils salutaires. Jean pressait son ami de mettre fin au trouble excité clans l’Eslisepar ses attaques contre le0J2T ; « ;  ; il lui rappelait l’exemple de Théodore de Mopsueste lui-Tome III.

même qui, dans une occasion moins solennelle, n’avait pas hésité à rétracter publiquement une parole prononcée en chaire, plutôt que de scandaliser les fidèles ; il lui rejjrésentait que ce mot de Ws5r « 5î n’avait jamais été rejeté par les docteurs de l’Eglise ; que plusieurs, parmi les plus grands, l’avaient employé ; qu’il traduisait une vérité admise par tous les chrétiens, à savoir la divinité du Fils de la Vierge : et qu’à prendre ombrage du mot on risquait de paraître nier la chose.

Cette lettre est fort intéressante, parce qu’elle montre que le patriarche d’Antioche ne partageait pas tons les préjugés de l’école antiochienne et qu’à cette date au moins, il fut le bon génie de Nestorius. D’ailleurs il ne parlait pas seulement en son nom per sonnel, mais au nom de plusieuv" <%.éques alors réunis dans sa ville épiscopale ; danslà liste de ces évêques, nous relevons un nom illustre, celui de Théodorel, évêque de Cjt, destiné à un rôle de premier plan dans la suite du conflit nestorien.

Rome, Alexandrie, Antioche, se prononçaientd’une seule voix en faveur de la doctrine rejetée par Nestorius. Que va faire le patriarche de Constantinople ? Sa réponse à Jean d’Antioche est fort courtoise. Il remercie son ami de ses témoignages d’affection et le félicite de son zèle pour la paix de l’Eglise. Il déclare n’être pas l’adversaire irréductible du mol Os’ircx’j ; , mais avoir voulu prévenir les dangers que ce mot présente, car il a besoin d’explication : on peut trop aisément lui donner un sens arien ou apollinariste. Au reste, que le patriarche d’Antioche se rassure : toutes les explications désirables seront fournies dans le concile qui se prépare et qui mettra un frein à la présomption coutumière des Egyptiens. En post-scriptum, Nestorius se vante d’avoir rallié à sa cause le clergé, le peuple et la cour.

Voilà donc le grand mot lâché : au lieu de capituler devant la sentence romaine, Nestorius préjiareun concile. A la coalition des trois grands patriarcats, Rome, Alexandrie, Antioche, il rêve d’opposer une réunion plénière de l’épiscopat et, à cet effet, s’est emparé de l’esprit de l’empereur. Le ig novembre, une circulaire impériale avait été lancée pour enjoindre à tous les métropolitains de l’empire de se trouver à Ephèse avec quelques-uns de leurs suffragants les plus distingués, pour la Pentecôte de l’année suivante.

Entre temps, Cyrille d’Alexandrie préparait l’accomplissement de la mission qui lui avait été confiée par le pape. Il avait voulu agir de concert avec l’épiscopat égyptien, et un synode s’était assemblé à Alexandrie pour arrêter les termes de l’ultimatum qui devait être adressé à Nestorius. Une lettre fut rédigée, qui fait vivement ressortir l’unité de personne dans le Christ, à l’encontre de la conception nestorienne. Elle se termine par douze anathématismes, dont voici le premier : Si quelqu’un refuse d’admettre que l’Emmanuel est i-raiment Dieu, et conséquemment la sainte Vierge mère de Dieu, comme ayant en^tendré selon la chair le Verbe de Pieu fait chair, qu’il soit anathème. Le 3 novembre /|30, cette pièce fut signée par tous les évêques réunis autour de Cyrille.

Trente-trois jours après la clôture du concile d’Alexandrie, le 6 décembre, parvinrent à Constantinople les députés alexandrins chargés de remettre à Nestorius la formule qu’il devait souscrire dans un délai de dix jours, s’il voulait rester en communion avec l’Eglise romaine et le reste de la chrétienté. Mais il y avait déjà dix-sept jours que les courriers impériaux portaient sous tous les cieux l’ordre de convocation du concile, et Nestorius triomphait. Etrange époque, en vérité, que celle où un César