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MYSTERES PAÏENS (LES) ET SAINT PAUL

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celles des religions de mystères, ne pouvaient qu’être extérieures à celles qui formaient un tout bien uni dans son esprit.

Nous reconnaissons que l’Apôtre a connu certaines doctrines des religions de mystères, et même des rites de ces mystères ; il ne pouvait en être autrement, car ces idées étaient, on peut le dire, du domaine public, elles n’étaient pas secrètes. En outre, Paul, en fréquentes relations avec des convertis païens, dont quelques-uns avaient été initiés aux mystères, a dû apprendre de ceux-ci les conceptions et les rites des mystères : les premières pour les combattre et les secondes pour les juger. Que certains termes, tels que yvâsi ; , ôof^, zvt’ju.v., « jj, aient traduit dans les religions de mystères des conceptions analogues à celles que nous retrouvons dans les épîtres pauliniennes, cela ne prouve en aucune façon que Paul leur ait emprunté ces idées. Ressemblance n’implique pas dépendance. Les idées que représentaient ces termes venaient d’ailleurs à l’Apôtre, en très grande partie, de l’Ancien Testament.

Il peut y avoir eu aussi des analogies d’idées. « Des idées très générales, remarque L. Venard (Les oriifines clirdtiennes, dans : Où en est l’histoire des religions, t. II, p. 225. Paris, igi i), peuvent se retrouver à la base de beaucoup de religions dilïérentes, sans qu’il y ait lieu de supposer une influence réciproque, connue par exemple l’idée de la participation à la vie d’un Dieu Sauveur, idée qui peut naître spontanément des besoins religieux communs à l’humanité. Pour pouvoir affirmer que saint Paul l’a empruntée aux cultes d’Adonis onde Millira, il faudrait que la ressemblance s’étendit à la conception même du salut et au mode de sa réalisation. Or, tout le monde doit reconnaître qu’en dehors de l’idée générale commune, il y a plus de dilTérences que d’analogies entre le christianisme paulinien et les diverses formes du paganisme mystique. »

En délinitive, la théologie particulière de l’Apôtre était fondée sur des conceptions absolument étrangères aux conceptions païennes, à savoir sur la foi en Jésus-Christ crucitié, envoyé dans le monde par son Père pour sauver l’hiimanité par sa mort rédemptrice.

Quant aux rites sacramentels, tels que le baptême et l’eucharistie, il les avait reçus de la tradition apostolique ou de Jésus-Clirist lui-même, et il les conservait intégralement, tout eu les éclairant à la lumière de ses doctrines. L’explication qu’il en donne, représentant le sacrilice complété par la manducation de la victime comme une communion du lidèle avec la divinité, est une idée sémitique et juive, plutôt qu’hellénique.

u Quelles que soient d’ailleurs, alBrme VENAnD(o/). cit., p. 226), les analogies de surface qu’on peut relever, il y a une différence profonde, au point de vue moral et religieux, entre les cultes orientaux et le christianisme tel qu’il apparaît dans l’enseignement de saint Paul. Sans doute il y avait des âmes d’élite qui cherchaient dans la mystique païenne la satisfaction d aspirations élevées. Mais, sans parler même de l’immoralité de certains rites, il faut reconnaître que, en général, on attendait de l’initiation aux mystères une pureté rituelle, obtenue par des procédés presque magiques, et sans lien direct avec la pratique de la vertu, plutôt ([u’une vraie puritication morale. La mystique chrétienne au contraire vise à changer les âmes, elle tend à la réforme de tout l’homme, à la création d’un homme nouveau, en qui l’action de l’Esprit divin se manifeste par la sainteté de la vie et des œuvres. » Le P. Lagrange conclut ainsi son étude sur l’école du syncrétisme judéo-païen. « Les religions païennes — surtout

celles d’Osiris, d’Adonis et d’Attis, vieilles religions naturalistes — essayèrent en vain de dépouiller l^ur grossièreté native par un symbolisme transcendant. Le christianisme, religion de l’esprit, aurait plus d’une fois été contaminé par elles, si l’autorité ecclésiastique n’avait préservé les ûdèles. Le dieu souffrant qui lutta le plus énergiquement contre le Christ et qui vraiment lui disputa les àm^s, fut Attis, le plus méprisé de tous, avec ses tauroboles ou baptêmes de sang, qui se donnaient pour plus efficaces que le baptême par l’eau. Mais quelles spéculations philosophiques pouvaient réhaLiliter celle douche de sang, semblable, disait Cumont, op. cit., p. 88, à quelque orgie de cannibales. »

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