Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 3.djvu/719

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

1425

PAPAUTE

1426

H l’Eglise universelle cette doctrine avec obligation de la tenir (tenendam, c’est-à-dire par une adhésion intéricuri" et ferme ; cf. S. Thom., Ilallae, q. i, à lo). ! lbid., co. tt{. Ailleurs la définition est appelée une sentence définitive et terminative.>, col. 416 ;

« une sentence péreniptoire », col. a88. C’est sur ces

explications du rapporteur que le Concile a voté : de là leur importance capitale. — Les tbéclogiens, avec plus ou moins d’autorité, sont venus ensuite donner des développements et des exemples. Voir surtout le card. Billot, De Ecd., 2' éd., igoS, p. 65(5 sq. ; de Groot, O. p., Summa apologet. de Eccl., 3" éd., 1906, p. 605 sq.

/<) Que t’eut dire cette autre expression deux fois employée : « une doctrine sur la foi ou les mœurs » ?

« Elle énonce Vohjet de l’infniUiliilité (l’espèce de

questions ou de doctrines dans lesquelles le Pape est infaillible), mais seulement d’une manière générale », dit l'évêque rapporteur de la commission, Acta Concilii Vaticani, col. ^16. Déjà dans sa Session m', au cours de son décret, traitant de l’infaillibilité de l’Eglise comme interprète des Ecritures, le concile avait employé cette formule. Reproduisant les paroles mêmes d’un décret du concile de Trente (D. H., 'j86), le concile du Vatican déclarait vrai et obligatoire pour les lidèles tout sens scripturaire tenu par l’Eglise ou par l’unanimité des Pères » dans les choses de la foi et des mœurs appartenant à la structure ( « e(ii/ic « /ionem) de la doctrine chrétienne » (D. B., 1788). Et le rapporteur avait rappelé, auparavant, que lorsque l’on oppose ce qui concerne la foi à ce qui concerne les mœurs, on entend par les choses de la foi » les dogmes qu’on pourrait appeler spéculatifs >', Acta., col. a^o. C’est donc la division actuelle de la doctrine chrétienne en dogme et en morale, en doctrine plutôt spéculative et en doctrine pratique ; ce que le chrétien doit croire (comme la Trinité), et ce qu’il doit non seulement croire, mais encore pratiquer (comme les commandements de Dieu). — Notons que cette formule traditionnelle in rébus fîdei et morum est restrictive et limite l’infaillibilité du Pape ; Acta, col. ^oi.

Mais l’objet de l’infaillibilité du Pape se complète par la phrase qui suit dans la définition du Concile :

« Le Pontife a la même infaillibilité qu’a l’Eglise

quand elle définit » (c’est-à-dire dans un Concile œcuménique). « Par cette phrase, suivant l’exposé du rapporteur, cet objet est déterminé par comparaison avec celui des définitions de l’Eglise ; tellement qu’on doit dire de l’iiii ce qu’on dit de l’autre. » Acta, col. ^ 16. < L’infaillibilité, dit-il encore, a été promise pour garder dans son intégrité, en le développant, le dépôt de la foi (ou des vérités réfélée.^). Mais les vérités qui se rapportent i’i la doctrine de la foi et des mœurs chrétiennes ne sont pas toutes au même degré nécessaires à la garde du dépôt. » fbid., 414. " Quand elle définit les dogmes de la foi (comme révélés), il est de foi que l’Eglise est infaillible (le nier serait une hérésie)… Mais d’autres vérités, sans avoir été révélées elles-mêmes, sont requises i)our bien garder le dépôl, le bien expliquer et le définir eflicacement : ces vérités, où sont compris tout spécialement le.s faits dogmatiques, sont pour l’Eglise, du consentement de tous les théologiens, un objet de définition infaillible, et le nier serait une grave erreur. Mais l’infaillibililé de l’Eglise, quand elle définit ces choses, est-elle de foi, et serait-on nérétique à la nier ; ou bien est-elle seulement déduite de la révélation, et tliéologiquement certaine ? Sur cette différence de certitude, les théologiens sont partagés… Même question peut se poser à propos de l’infaillibilité pontificale, puisqu’elle a même objet que celle de l’Eglise… Mais les Pères de la Commission ont pensé, à l’una nimité, que cette controverse-là ne devait pas être définie, du moins maintenant (à propos du Pape), et qu’il fallait la laisser dans le statu quo. Il s’ensuit nécessairement que notre définition doit être tellement conçue, qu’elle oblige à tenir sur l’infaillibilité du Pontife romain absolument le même objet que l’on tient pour celle de l’Eglise. » Ibid., col. 415. Il s’ensuit aussi que le Pape (comme l’Eglise) applique infailliblement aux erreurs contre la foi ou les nneurs les censures inférieures à la note d’hérésie, et que ce serait une erreur grave de le nier. Ibid., et col. 475. — Voir Lucien Chocpin, Valeur des Décisions… du S. Siège, 2' éd., Paris, 1918, p. 38 sq.

c) Qu’entend on par « infaillibilité » ? — Au concile, tout en écartant certains sens faux de ce mot, comme nous le verrons ci-dessous, on n’a pas insisté sur le sens vrai, parce qu’il était assez connu de tous les catholiques instruits, qui ont toujours et unanimement professé le dogme de l’infaillibilité de l’Eglise, et conçu assez clairement ce que le mot

« infaillibilité » veut dire. Cependant il sera bon de

préciser ce qui, dans cette idée assez claire, peut rester d’un peu confus ; d’autant plus que, dans la question qui nous occupe, cette idée est fondamentale. On peut éviter l’erreur et atteindre la vérité de deux manières fort différentes. Quelquefois, d’une manière purement fortuite et accidentelle, où l’on rencontre le vrai comme par hasard, sans preuve, ou avec des preuves insuflisantes. Je hasarde l’explication d’un fait : il se troue ensuite que j’ai bien rencontré : mon acte intellectuel était sans erreur. On peut donc lui atlril)uer l’inerrance, mais une inerrance de fait, et non pas de droit, parce que rien en moi, quand j’ai hasardé cette hypothèse, ne fondait un droit à la vérité, une nécessité de l’atteindre, une impossibilité d’erreur. D’autres fois au contraire, le sujet évite l’erreur, non point par hasard, mais en vertu d’un principe qui crée en lui une nécessité d’atteindre le vrai, une impossibilité de se tromper. C’est le cas de l’infaillibilité, iner rance de droit : il y a alors dans le sujet ou dans son acte quelque chose qui réclame le vrai, qui rend impossible le faux ; ce qu’indique en latin la comjiosition du mot lui-même : fallt-bilis, qui peut se tromper ; in-fallibilis, qui nepeutpas se tromper.

L' « infaillibilité » peut ne porter que sur un actt passager, considéré en lui-même ; cet acte intellectuel peut avoir une inerrance de droit, à cause de sa perfection individuelle, de sa valeur logique, par exemple de son évidence immédiate, ou de la force (le la preuve qui lui sert de base et qui lui donne sa valeur. On dira alors que cet acte est d’une certitude « infaillible », et le concile de Trente parle ainsi, Sess. VI, can. 16, />. B-, 826. Mais dans le plein sens du mot, le seul qui doive ici nous occuper, l’infaillibilité ne porte pas seulement sur un acte de la personne, mais d’une manière générale sur la personne elle-même. Ainsi parlons-nous de l’infaillibilité de Dieu ou de celle du Pape : avec cette différence que Dieu tient de son essence l’infaillibilité illimitée et alisolne, tandis que le Pape reçoit du bon plaisir de Dieu une infaillibilité limitée et relative : limitée à une certaine matière, c’est-à-dire à la doctrine sur la foi et les mœurs ; relative à une circonstance bien déterminée, à savoir, quand le Pape fait appel à sa suprême autorité doctrinale : alors, mais alors seulement, nous serons sûrs, comme a priori, que sa parole est sans erreur. Et pour nous en convaincre, nous n’aurons pas à étudier la valeur logique des raisons par lesquelles a passé l’esprit du pontife. Ce qui serait nécessaire s’il s’agissait d’une personne quelconque, dont l’affirmation vaut ce que valent ses preuves, n’est plus nécessaire quand il s’agit