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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/22

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PIERRE (SAINT) A ROME

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noble gloire, enseigné la justice au monde entier, être allô jusqu’au terme de l’Occident et avoir rendu témoignage devant les autorités, enfin il a quitté le monde, il est allé au séjour de sainteté, modèle incomparable de patience. Autour de d-s hommes vertueux s’assembla une grande multitude d élus qui, ayant souilert bien des outrages et des tortuies par l’effet de la jalousie, ont donné parmi nous un inagnilique exemple. C est la jalousie qui poursuivit des femmes, telles des Danaidesou des Diros, leur inlligea des outrages cruels et impies, tant qu’ayant fourni jusqu’au bout la carrière de la loi, elles conquirent une noble récompense, en dépit de la faiblesse de leur corps…

Il importe de remarquer, dans cette page, écrite de Rome, la réalité du cadre historique. Cette grande multitude — imXù 7M1J90j — est la même dont parle Tacitb, Ann, XV, xliv, multitudo ingens, la multitude des victimes romaines de la persécution de Néron Ces inventions théâtralesdesupplices, transformant en Danaïdes ou en Dircès les martyres du Christ, sont les mêmes que décrit avec plus de détails l’historien romain. Et c’ct au milieu de cette multitude que saint Clénv-nt montre les deux apôtres Pierre et Paul.TiûrotitoîixvSpc'.tcjioi’jiiTTo'/injacfné-jcii cwrjBpoiiOf, 715/ù lùffio ; 'c/.'/.sxtCij. Cette association 'ie présente aucun sens plausible si Pierre et Paul n’appartiennent pas au martyrologe de l’Eglise romaine. D’ailleurs les termes dont Clément use pour les présenter sont, par eux-mêmes, assez clairs : A « £w//.=v ttpb ifdy.ijj.CiJ cpCiv to’jc, àyx60 : JZ à.itoariXovi. Il faut bien se garder de rattacher, comme on l’a fait trop souvent, le génitif vjjw&v à i- T dy.'jp.iiJ, construction d’une platitude intolérable : fytuBv appartient à ^-iïto'/s-jç, et ce n’est pas en vain que Clément, exhortant les Corinthiens au nom de l’Eglise romaine, revendique Pierre et Paul, en disant : nos apôtres. Impossible donc de méconnaître ici le témoignagede la traditionromaine en faveur du martyre des deux apôtres, dont la séparait une seule génération, et que pouvaient encore garantir des témoins oculaires.

Au reste, il semble bien que saint Pierre témoigne de son propre apostolat à Rome. A la lin de la lettre qu’il adresse aux chrétiens de Pont, de Galatie, de Cappadoce, d’Asie et de Bithynie, nous lisons, I, Pet., v, i 3 : « L'(Eglise) élue qui est à Babylone vous salue, et Marc mon fils » 'AanciÇeTut ù/x « ; h Iv BxCu/tSvi ffjvtx/£/T/ ; xai Ma^oxoç i j161u.au. On ne peut guère s’arrêter, et, de fait, personne ne s’arrête aujourd’hui à l’idée que saint Pierre et l'évangéliste saint Marc aient pu porter leurs pas vers l’Assyrie et fonder une Eglise à Babylone, dont il ne restait rien, que des ruines. La seule Babylone dont il puisse être question ici, est celle que le langage du N.T. désigne par ce nom, la grande prostituée de l’Apocalypse. assise sur sept collines, Ap„ xiv, 8 ; xvi, 19 ; xvii, 7 ; xviii, a. 10. ai. Dans ce sens, Rrnan, L’Antéchrist, p. 1 22, n. 2 — La mention de l'évangéliste saint Marc est d’ailleurs parfaitement en situation : caries épltres de saint Paul nous le montrent à Rome vers ce temps-là ; voir Col., iv, 10 ; Phil., a£ ; Il Tim., 1v.11 ; et l’on sait qu’une tradition très ancienne le présente comme le compagnon et en quelque sorte le secrétaire du prince des Apôtres, Màpxos i^/iqwwpqc Uérpcu -/cv.fitvji, ditPAPivs, ap.Eusi’tBB, //./?.. III, xxxix, P. G., XX, 300 B. Donc rien ne s’oppose à ce que saint Pierre ail daté son épître de Rome, où il résidait avec saint Marc. Si l’on veut abs’dument que l'éplire soit inauthentique, si l’on ne voit dans ces données

« le lieu et de personnes que l’artifice ingénieux d’un

faussaire, on devra du moins rendre hommage à la force de la tradition ancienne, avec laquelle le faussaire a dû compter. Il n’y a qu’une voix pour reconnaître dans la l* Pétri l’un des premiers écrits du N.T.

Les Actes des Apôtres, qui nous permettent de

suivre jusqu'à Rome la trace de saint Paul, n’ont pas conservé celle de saint Pierre, ce qui s’explique très naturellement, Pierre étant venu à Rome par une autre voie. D’ailleurs on comprend que saint Luc, tout occupé du personnage de Paul, n’ait pas trouvé, à la dernière page de son livre, l’occasion de nommer Pierre, soit que Pierre fut momentanément absent de Rome, soit que l’apostolat de Paul s’exerçât sur un autre terrain.

Mais le personnage de Pierre n'était pas de ceux qui échappaient aux regards jusqu'à devenirdès lors matière de légende. Dans le temps même où Clément rappelait le martyre subi par Pierre à Rome quelque trente ans auparavant, l’apôtre saint Jean consignait dans son Evangile l’annonce de ce martyre faite à Pierre par le Seigneur(/oa ; /., xxi. 18 19). Toutes ces données concordent. Et les documents profanes sont loin « le les démentir. Sknkqub paraît avoir vu l’héroïsme souriant des martyrs de Néron. Ep. ad Lucilium, lxxvih. Comme Tacite, il parle de croix, il parle même d’un mode nouveau de cruciliement, la tête en bas : Video istic cruces non un tus r/uidem gcneris, sed aliter ab aliis fabricatas : cupite qiiidem conversas in terrain suspendere.

En résumé, la tradition historique, loin d'élever contre le fait de l'épiscopat et du martyre de saint Pierre à Rome, des difficultés insurmontables, semblerait, par plus d’une voie, la rejoindre.

En particulier, elle ne nous invite nullement à disjoindre le fait de l'épiscopat et celui du martyre, à retenir celui-ci et à écarter celui là. Qu’est-ce que Pierre et Paul étaient allés faire à Rome ? Evangéliser et fonder cette Eglise, EvayyeXiÇo/iévorj xai f)e.<Jx/ioj wj rb> 'Ety.'/r^to-.j, dit saint Irénkk, I/aer., 111, i, 1. Fonder et édilier, dit-il un peu plus loin, 111, ni, 3 : Qs/t£jiûaayTei oyj xoù oUzSo, i J.rJ7C/.v7ei oi fj « /.</.pt', i 's-itzc'/ii t>, j Exxhjaieoi, ElCaïus : r « 0zr, v iSputa/xé-ju-j rm 'ExxAïjtrt’eo », Dbnys db Corinthe parle de plantation : rr.v à-nà TïTpo, xix.i HkùXov fureicai fanfistmv, Ignace d’Antioche parle de l’autorité exercée sur les Romains par les deux apôtres. Clément de Romk les montre comme les coryphées des martyrs romains.

On a quelquefois cru trouver, Act., xii, 17, la trace du départ de saint Pierre pour Rome, en l’an ^2. Simple conjecture. Quant à la présence de Pierre au concile de Jérusalem, en l’an 50 (Act., xv), elle ne constitue pas une objection grave, Pierre ayant fort bien pu évangéliserRomesans s’ylixer tout d’abord. Toujours est-il que, s’il est venu à Rome, il n’y est pas venu en touriste, mais dans la plénitude de son pouvoir apostolique ; c’est un fait reconnu par beaucoup de protestants ; tel, R. Lirsius, dans Jalirb. f. protest. Théologie, 1876, p. 56a.

Il est assurément plus difficile de montrer que saint Paul, si étroitement associé à saint Pierre dans le souvenir de l’Eglise romaine, n’a pourtant pas, au regard de cette Eglise, tous les mêmes titres que saint Pierre Néanmoins, même à cet égard, les indications ne font pas défaut.

Notons d’abord que, si l’on parle d’un épiscopat romain de saint Paul, on peut entendre cet épiscopat de deux manières. Ou comme un titre simplement commun aux deux apôtres, les mettant sur un pied d’absolue égalité. Celte proposition a été déclarée hérétique par Innocent X. Decr S. Inq, , 25 ian. 16^7 : Sanctissimus propositionem hanc : S.Petrns et S. Paulus surit duo Ecclesiæ principes qui unum c/ficiunt, vel surit duo Ecclesiæ catholicæcorypliæi ac supremi duces summa inter se umlate coniuncti, re/ surit geminus universalis Ecclesiæ ver. ter qui in unum divinissime coaluerunt, vel surit duo Ecclrsiæ sumrni pastores ac præsides qui unicum caput constituant, ita explicatam ut ponat omnimo-