Aller au contenu

Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/296

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

579

RÉDEMPTION

580

saint Athanasb, De Incarnatione Verbi, m., P. (>., XXV, I 12 B : ’Ynip -K/ra ; -/à/5 iiv è Ao’yo ; tgû 0£ou îixo’tw ; tcv’ecuTîû vaov x « i toi/jlxtixoj op-/aa/ov TTp070c/uv iaTityw/Zi iitiip rawrwv, liùa^pou ts iftùà/utDOit’ev tû Oxjktu. Que l’on pèse ces expressions ; on y trouvera toute la substance du mérite et de la satisfaction.

L’essence du christianisme fut, dès le principe, assez détinie pour imposer ou pour suggérer toutes les traductions donton nous conseilleaujonrd’hui l’abandon . Les abandonner serait renoncer au christianisme même. Passons donc à la partie positive du programme. Aug. Sabatier écrit, p. 99-101 ; 105-107 :

La plus grave conséquence de l’ancien point de vue juridique et légal, ce fut d’introduire un dualisme irréductible dans la notion chrétienne de Dieu, c’est-à-dire de détruire la notion du Père que Jésus nous a révélé. On a fait surgir, en efTet, un conflit intense entre sa justice et sa clémence, de façon que l’une no se pouvait plus exercer sans offenser l’autre. Le Christ, au lieu d être le sauveur des hommes, est devenu un médiateur intra-divin, dont 1 office essentiel était de réconcilier en Dieu ses attributs hostiles et de faire la paix et l’unité en Dieu même. On appelait cela de la haute métaphysique ; c’était pure mythologie.

I.’œuvre de restauration dogmatique, ici, doit donc commencer par la restauration de l’idée du Dieu Père. Dieu n’a pas besoin d’être réconcilié avec lui-même ; il n’a pas besoin de médiateur en lui, car il est un il est un dans le châtiment du péché et dans le salut des pécheurs.. Notion inférieure de la justice que celle qui réclame le châtiment pour le châtiment même, pour le plaisir de fair. » souffrir. La vraie et divine justice poursuit le triomphe du bien sur le mal, et dès lors nécessairement so confond avec l’amour… D’un bout à l’autre de l’Evangile, le pardon des péchés est promis, sans plus, à la repentance et à la foi, parce qu en effet la repentance et la foi sont, dans la vie intérieure de l’âme, le commencement de la défaite et de la destruction du péché…

Pour l’œuvre du salut des pécheurs, Jésus Il avait donc pas à agir sur Dieu, dont l’amour avait pris et f^ardé à jamais I initiative du pardon. Dieu n’a pas besoin d’être rapproché de l’homme et réconcilié avec lui ; mais c’est 1 homme qui a besoin d’être ramené à Lieu… L’œuvre du Christ sera de réaliser dans 1 individu et dans l’humanité cot état de repentance dans lequel seul le pardon du Père peut avoir son efficacité. A tous les renoncements, à tous les efforts de sa vie sainte, Jésus ajoute ses souffrances et sa mort, pour mieux manifester encore son amour et son dévouement, et par ce dévouement, toucher enfin les cœurs que ses bienfaits n’auraient pas encore émus, et vaincre les esprits que son enseignement n’aurait pas gagnés. >a mort n est pas un moment différent du reste de sa vie ; c’en est la consommalion. .. C’est le plus puissant appel à la repentance que l’humanité ait jamais entendu, et aussi le plus efficace, le plus fécond en merveilleux résultais. Lacroix n’est l’expiation des péchés, que parce qu’elle est la cause de la repentance a qui la rémission est promise. Plus j’y ai réfléchi, plus je suis arrivé à retto conviction ferme : il n’y a dans le monde moral et devant le Dieu de l’Evangile d’autre expiation que la repentance, c’est-à-dire ce drame intérieur de conscience où l’homme meurt au péché et renaît à la vie de la justice. Il n’y a rion de plus grand ni de meilleur, car la repentance, c’est la destruction du péché et le salut du pécheur, c’est l’accomplissement en noua de l’œuvre divine…

En deux mots : on reproche à la doctrine traditionnelle de la Rédemption d’imaginer en Dieu même un drame absurde, entre ses attributs, et de méconnaître le drame réel, qui a pour théâtre la conscience du pécheur. C’est dans la conscience du pécheur, et non pas en Dieu, que se consommerait le vrai mystère de la Rédemption.

Dramaturgie fantaisiste, qui ne représente pas le christianisme réel.

Le conflit entre les attributs divins, dont le théologien libéral se scandalise, a pu être dramatisé maladroitement par tel orateur sacré ; et sans doute il n’y a pas de conflit réel en Dieu. Mais à moins de vouloir nier l’évidence, il faut convenir que la complexité des options qui se posent au regard du gouvernement divin sollicite, — selon notre manière de

concevoir, — des interventions diverses de la puissance divine. Dieu tantôt s’incline pour faire grâce : c’est l’heure de la miséricorde ; — et tantôt punit :

— c’est l’heure de la justice. Le conflit, que l’homme imagine spontanément, se dénoue par une initiative divine, non par l’office d’un médiateur intra-divin. Pour pouvoir ridiculiser ce personnage, il a fallu l’inventer.

Médiateur, Jésus Christ l’est effectivement ; non pas médiateur intra-divin, ce qui n’a aucun sens, selon saint Paul, Gal., ni, ao, cité par Aug. Sabatier, p. 100 ; mais médiateur entre Dieu et l’homme, à raison de sa nature humaine : ce nom lui est donné expressément I 1 un., ii, 5, et par trois fois dans Heb., viii, 6 ; ix, 15 ; xii, 2/J ; — mis en relation avec le NT, confirmé par son sang. Médiateur pour représenter à Dieu, avec l’autorité d’une sainteté sans tache, les misères et les besoins de l’humanité pécheresse et obtenir le pardon. Le nom de médiateur importe moins que l’idée de la médiation et du pardon, qu’on trouve à chaque page en saint Paul.

Il n’est pas besoin, pour autant, de restaurer l’idée du Dieu Père, laquelle n’a souffert aucun dommage. Il n’est pas davantage question d’une « justice qui réclame le châtiment pour le châtiment même, pour le plaisir de faire souffrir ». Mais l’ordreessentieldes choses appelle une réparation qui sauvegarde, jusque dans le pardon, l’honneur de Dieu et les droits de sa justice. C’est en vue de cette réparation que le Christ se fait médiateur et caution de l’humanité. Avant même de se tourner vers l’humanité pour l’inviter à la repentance nécessaire, il s’est tourné vers son Père pour acquitter la dette de l’humanité coupable et préparer les voies du pardon. Par lui, en vertu de cette réparation objective, l’humanité trouvera accès près du Père, Eph., ii, 18 ; iii, 12. Mais il a fallu que le Saint des saints nous fût ouvert par le Pontife de la nouvelle Alliance (Heb., ix, ia).

On nous invite à ne voir dans le péché rien d’antre qu’une incorrection passagère de l’homme ; et l’on nous assure que, l’incorrection venant à être redressée, le péché sera comme non avenu. C’est aussi simple que peu convaincant, pour qui croit à la Majesté divine et garde présentée l’esprit la prédication des Prophètes et des Apôtres. Le péché est, dans son fond, un déni de justice envers la majesté divine. Même rétractée, même désavouée par le redressement de la volonté coupable, l’offense demeure. Et sans doute nous croyons volontiers que Dieu ne tiendra pas rigueur au coupable repentant ; mais celui-ci demeure à tout jamais impuissant à renouer la chaîne qu’il a brisée par sa désobéissance, à réparer de son fonds. Telle est la raison objective qui appelle une médiation autorisée. Le Fils de Dieu fait homme a pris sur lui cette médiation. Au pécheur il offre un exemple ; mais à Dieu, d’abord, un hommage, qui l’incline à relever jusqu’à lui le pécheur. On ne peut nier que tel soit le sens profond du christianisme.

Nous avons vu le moderne protestantisme libéral s’engager dans une voie diamétralement opposée à celle où s’égara l’ancienne orthodoxie luthérienne. Il faut noter l’aboutissement de l’une et de l’autre.

L’ancienne orthodoxie luthérienne, en mettant l’accent sur la justice vindicative de Dieu, aboutit à majorer la doctrine de l’expiation pénale jusqu’à l’absurdité, jusqu’au blasphème. Le moderre protestantisme libéral, par une évolution contraire, aboutit à supprimer les idées de rédemption et de sacrifice rédempteur. Il estime vaines toute » les spéculations delà théologie autour de ces idées. Par ailleurs, il trouve dans l’ordre moral assez de grands mots