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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/42

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POSSESSION DIABOLIQUE

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Remarquons enfin cette manière de broder sur la trame de l’histoire, peu digne d’un savant : suffit souvent, tels étaient sans doute, qui sait, presque à son insu. 1

Voilà tout ce que les rationalistes ont pu trouver contre les possessions démoniaques racontées dans les Evangiles, et en usant de toutes les ressources que la haine et des connaissances variées ont pu leur fournir.

Notre premier argument, en faveur de la possession diabolique, argument tiré des récits évangéliques, reste debout.

II. Les saints Pères. — Les saints Pères nous fournissent, comme les Evangiles, un argument apodictique en faveur de la réalité de la possession diabolique ; ils confirment d’une manière éclatante la vérité de l’histoire sacrée, en nous montrant dans les premiers siècles de l’Eglise de nombreux faits de possession, semblables à ceux qui se trouvent rapportés dans les Livres saints. Nous voyons ainsi s’accomplir en même temps et les paroles de Jésus-Christ : Nanc princeps hujus mundi ejicietur foras {Jean, xii, 31), et sa promesse faite aux Apôtres et aux fidèles : In nomine meo dæmonia ejicient (Marc, xvi, l-j).

Les Pères des premiers siècles sont si unanimes à témoigner des faits de possession, et de l’efficacité de l’invocation du nom de Jésus pour chasser les démons des corps des possédés, qu’il faudrait plutôt les citer tous, que de rapporter seulement le témoignage de quelques-uns d’entre eux. Nous serons forcés de donner simplement leurs noms, en signalant quelques passages plus importants de leurs ouvrages. Nous résumerons ensuite leur doctrine, avec quelques remarques propres à faire ressortir tout le poids de notre argument ; et à cette occasion nous reproduirons quelques textes in extenso. — Parmi les Pères et les écrivains ecclésiastiques qui affirment la réalité des possessions diaboliques de leur temps, nous pouvons citer :

Saint Justin, II Ap., ti, P. C, VI, 453 B.Dial. cum Tryphone, lxxxv, P. G., VI, 675 C. — Saint Théophiie d’Antioche, II, viii, P. G., VI, 1061 B. — Saint Irbnee, Adv. Hær., II, xxxiv, 4, P. G., VII, 829 A. — Minucius Félix, Octavius, xxvii, P. L., III, 323-327. — Tertullien, Apot., xxi il, P. L., I, 415 et sqq ; xxivii ; xi.m ; ib., pp. 463, 495 ; De corona mililis, xi, P. L., II, 92 A ; De anima, lvii, P. L., II, 748 ; Ad Scapulam, II. iv, P. L., I, 700. 703. Cf. A. d’Ai.es, Théologie de Terlullitn, p 158-161, Paris, 1905.

— Actes dé Pierre, XI. xii, éd. Vouaux, p. 298-308. Paris, 1922. — Pseudo-Clément, Recogn., IV, xx, P. G.,. 1323A.

— Origene, Adv. Cels., I, il-m, P. G., XI, 656. 657 ; VII, m, 1424. — Saint Cyprien, Ad Demetrianum, xv, P. L., IV, 555 ; Ep., lxxti, 15 (Ad Maçnum), P. L, III, 1550 B. Cf. A. d’Alès, Théologie de saint Cyprien, p. 18. 19, Paris, 1922. — Quod idoladiinon sint, v, P. L., l, 574. — Arnobr, Adv. Génies, I, xlvi, P. L., V, 777.778. — Lactance, Divinæ Institutiones, II, xvi ; IV, xxvn ; V, xxll-xxm, P. L., VI, 334. 534. 623.624. 629 ; De morte penec., x, P. L., VII, 210. 211. — Firmicus Maternus, De error. profan. relig., xi », /’. L., XII, 1013. 1014. — Eusèbe de Césarée, Contra Hieroclem, iv, P. G., XXII, 801 C ; //. E., V, vii, P. G., XX, 448. — Saint Athanasf, De Incarnatione Verbi Dei, xLvin, P. G., XXV, 181. —Saint Cvrillf de Jérusalem, Calech., x, 19, iv, 13, P. G., XXXIII, 688 C ; 472B.

— Saint IIii.airb. De Trinitate, XI. III, P. L., X, 401 B : In Conslanlium, viii, P. L., X, 584 B ; In Ps., lut, 7, 4.10, P. L., IX, 419 B — Saint Ambroise, Ep., xxii, 9. 16. 21, P. L., Vl, 1022 A ; 1024 A B ; 1025 C ; De obitu Theodosii, x, P. L., XVI, 1390 A. — Saint Grégoire de Nazianzp, Carm., II, ii, tu, 81, P. O., XXXVII, 1557. — Saint Jérôme, Adv. Vigilantium, x, P. L., XXIII, 348 C ; Ep., xxii, 6, Ad Euslochium, P. L., XXII, 398. — Saint Zenon db Vérone, Tract.. 1. I, xvi, 3, P. L., X, 374. — Saint Jean Chuysostome, Laudatio S. martyris luliani, 2, P. G., L, 669 j H-m.de futurorum deliriir, 2, P. G, LI, 348 ; In Mat., Nom., xxviii, 2. 3, P. G., LVII, 353. 354. — Saint Augus tin, Ep., lxxviii, 3, P. L., XXXIII, 269 ; De Gen. ad litt, XI, xxvni, 35 ; XII, xiii, 28 ; XVII, 35, P. L., XXXIV, 444. 464. 468. — Faustin et Marcellin, Libellas precum ad imperalorei, vii, P. L. XIII, 88 B. — Saint Paulin db Nole, Carm., xiv, De S. Felice, P. L., LX1, 465 ; xxyii, ib., 609. — Sulpice Sévère, ûial., ni, 6, P. L., XX, 215.

— Eée db Gaza, Dialogue, P. G., LXXXV. — Saint Grégoire le Grand, Hom. in Evang., xxiii, 6, P. L.. LXXVI. 1237 C.

Pour comprendre tout la force de notre argument, il faut bien constater d’abord ce que les saints Pères attestent réellement, et ensuite considérer toutes les circonstances de ce témoignage solennel et unanime. Ce que les saints Pères affirment incontestablement, c’est la réalité de la possession proprement dite et l’efficacité de l’invocation du nom de Jésus, parmi les premiers chrétiens, pour chasser les démons des corps qu’ils occupaient, pour forcer ces esprits à confesser ce qu’ils étaient, et à rendre malgré eux témoignage au Christ devant les païens, pour faire taire les devins, et réduire à l’impuissance la magie et toutes les opérations du démon.

C’est ce que nous disent très clairement, en particulier, Théophile d’Antiochb et Arnobb (II. cit.). L’éloquent disciple de ce dernier, Lactance, le grand apologiste du iv* siècle, écrit pour ne citer que ces seules paroles, Div.Inst., II, xvi : « Les démons craignent les justes, c’est-à-dire les adorateurs de Dieu, et adjurés en son nom ils sortent des corps des possédés ; flagellés comme avec des verges par ces paroles des chrétiens, non seulement ils confessent qu’ils sont démons, mais ils déclinent leurs noms, ces noms adorés dans les temples, et la plupart du temps ils le font devant leurs propres adorateurs, non pas, certes, en mépris de leur religion et de leur honneur, mais parce qu’ils ne sauraient mentir ni à Dieu, par qui ils sont adjurés, ni aux justes, dont la parole les tourmente et les contraint. » Nous pouvons ajouter, dans le même sens, un autre apologiste du iv’siècle, FmMicus Maternus, comme aussi saint Hilaire (//. cit.).

Mais, dira-t-on, les Pères furent trop crédules, et ils rapportent simplement des rumeurs vagues et incertaines ; déplus, c’est leur imagination ou le préjugé superstitieux qui leur fit confondre une terrible et singulière maladie, avec une prétendue opération d’esprits malfaisants.

Nous répondons que l’une et l’autre objection supposent, chez ceux qui les font, une ignorance grossière, non seulement du caractère et de la haute sagesse des Pères de l’Eglise, mais aussi du contenu de leurs écrits.

Et d’abord, il ne s’agit pas de rumeurs vagues, rapportées par les saints Pères, mais bien de faits qu’ils ont vus de leurs propres yeux, qui se sont passés en leur présence, dont ils ont eu l’expérience personnelle. Saint Gréc.oire de Nazianzb(L e.), pour prouver qu’il n’y a rien d’étonnant si Jésus-Christ a chassé les démons, dit : « Car moi-même, partie ou membre du Christ, souvent en prononçant seulement son nom vénérable, j’ai mis en fuite le démon, rageant, gémissant, proclamant la vertu du Tout-Puissant. » Eusèbe de Cksarkk invoque aussi sa propre expérience contre Hiéroclès, gouverneur de la Bithynie : Prout ipsa edocti experientia sumus. De même Tbrtullibn, contre Scapula, gouverneur de l’Afrique : Sicut plurimis notum est.

Il ne s’agit pas de quelques faits obcurs, mais de faits publics, au sujet desquels l’erreur était difficile, l’espoir de tromper impossible. Ces faits se passaient au vu et au su de tout le inonde, devant les gentils et les ennemis acharnés du nom chrétien. Ecoutons saint Justin, au nom de tous, II Ap., vi :