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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/53

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POUVOIR POxNTIFICAL DANS L’ORDRE TEMPOREL

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tificia, disputante, 1607-1609. Paris et Poitiers, Oudin, 1900, in-8°. Thèse qui l’ut précédée par celle de Mgr Quillirt : De avilis Potestatis Origine Theoria catholuu. Lille, 1893, in-8°, et par l’étude de l’abbé Fkret : l.e Pouvoir civil devant V Enseignementcatholiaue. Paris, Perrin, 1888, in- i 1.)

Les régaliens, césarienset gallicans du Moyen Age et de l’époque moderne rendirent donc au système du pouvoir conféré immédiatement aux gouvernants de L’Etat le mauvais service de l’associer à une conception païenne et fausse de l’autorité publique. Il en résulta, pour le système, un certain discrédit dans les écoles catholiques, jusqu’au dix-neuvième siècle. Mais, depuis une centaine d’années, la réaction doctrinale contre les erreurs de Jean-Jacques Rousseau et de la Révolution française, réaction légitime et nécessaire en son principe, conduisit les théologiens catholiques à une étude plus approfondie duproblème de l’origine du pouvoir, et cette étude profita considérablement à la théorie, naguère un peu disgraciée, de lacollation immédiate de l’autorité aux gouvernants de l’Etat. Non seulement Home ne frappa d’aucune réprobation le système renaissant, qui avait pourtant contre lui la faveur que lui avaient témoignée, naguère, tous les adversaires des doctrines romaines et pontificales, mais Rome parut presque adopter cette théorie dans l’Encyclique Diulurnum illu d, de Léon XIII(1881), et l’Encyclique Notre charge apostolique, de Pie X (1910). Le choix populaire, quand il se produit, au témoignage de cesdeux documents du Magistère, ne délègue pas le pouvoir, il désigne la personne qui en sera investie.

En 1910, la Revue augustinienne et, en 191 1, l’Ami du Clergé ayant exprimé l’avis que le système de Suarez et des anciens scolastiques serait, désormais, plus dillicile à soutenir pour un catholique, le R.P. Cavallera, dans le Bulletin de Littérature ecclésiastique, de Toulouse, démontra doctement et fermement, en 1 91 2, que la question de l’origine du pouvoir politique demeurait entière, et que l’opinion de Suarez et des anciens scolastiques conservait pleinement son droit de cité dans l’Eglise du Christ. C’est ce que nous avons, ici même, reconnu sans ambages. La controverse est toujours librement débattue entre catholiques.

Mais le langage qu’ont tenu Léon XIII et Pie X, sans vouloir trancher aucune question litigieuse, apporte à la thèse du pouvoir conféré immédiatement de Dieu aux gouvernants de l’Etat une garantie de sécurité doctrinale dont il n’est pas permis de méconnaître la portée. Voici en quels termes l’Encyclique Diuturnum illud caractérise la participation possible du peuple au choix de ses gouvernants : Interest autem atlendere, hoc loco, eos qui rei publicæ præfuturi sint posse, in quibusdam causis, voluntate iudicioque deligi multitudinis, non adversante neque répugnante doctrina catholica. Quo sane delectu designatur princeps, non conferuntur jura principatus, neque mandat ur imperium, sed statuilur a quo sit gerendum. Ce texte de Léon XIII est reproduit par Pie X, avec des commentaires qui en accentuent le relief, dans l’Encyclique Notre charge apostolique. Encore une fois, nous nous abstiendrons de tirer de semblables déclarations des conclusions trop absolues, que ne suggère pas le contexte prochain ou éloigné. Ni Léon XIII ni Pie X n’a eu pour intention, en parlant ainsi, de réprouver l’opinion de Suarez et des anciens scolastiques, ou de prendre positivement et directement parti dans la controverse entre docteurs catholiques sur l’origine du pouvoir politique. Mais on ne peut sérieusement contester que les deux documents susdits empruntent les

concepts et le

d’après lesquels

langage même des théologiens

l’investiture divine est conférée immédiatement, non pas au peuple entier, mais aux gouvernants de l’Etat. Nous en conclurons tout simplement que cette opinion nous apparaît, de la sorte, comme très appuyée, très hautement autorisée dans l’Eglise de Dieu. Personne n’a plus le droit de proposer le système de Suarez et des anciens scolastiques comme la seule théorie catholique en cette matière, et de présenter le système de Taparelli comme une théorie quelque peu suspecte, comme une survivance malencontreuse des idées de déification de la souveraineté politique, qui furent l’erreur du roi Jacques, des gallicans de l’ancienne France et de l’ancienne Europe, des légistes de Philippe le Bel et de Louis de Bavière. Désormais, la place est nette des vieilles polémiques où le problème de l’origine du pouvoir était obscurci par des contestations doctrinales qui n’avaient avec lui aucune connexion nécessaire. Les deux systèmes catholiques peuvent être soutenus avec une entière liberté parmi nous : on doit choisir, entre l’un et l’autre, d’après la probabilité plus ou moins satisfaisante quechacun découvre auxarguments rationnels dont l’une et l’autre école se réclame.

(Notons que l’éminent historien de François Suarez, le R. P. Raoul de ScoRRAiLLE, adopte, sur ce point, la théorie contraire à l’opinion du Doctor eximius ; tome II, p. 178 à 182.)

d) Conclusion. — La différence de conception entre les deux systèmes catholiques n’est que de peu d’importance théorique, et, par elle-même, n’engendre aucune divergence réelle dans le domaine pratique. C’est une controverse spéculative, sur laquelle il n’y a pas lieu de se passionner.

L’essentiel est de mettre en pleine lumière la doctrine authentique et certaine de l’Eglise catholique, doctrine à la fois rationnelle et révélée, de l’origine divine du pouvoir politique, qui donne un caractère moral et obligatoire à l’exercice légitime de l’autorité publique, dans les circonstances humaines et historiques où cette puissance trouve sa détermination concrète.

Tous les droits, ceux de l’autorité et de la liberté, des gouvernants et des gouvernés, obtiennent dans cette doctrine, leur franche et entière sauvegarde, sous l’égide mêmede Celui quia voulu la société politique et l’autorité politique, et qui a marqué les justes limites de leur pouvoir, en créant la nature humaine, avec ses exigences raisonnables, morales et sociales dans la ligne du bien commun temporel, raison d’être de la société et de l’autorité.

Il existe donc un droit divin des princes, ou des gouvernants, et un droit divin des peuples, ou des gouvernés. La vérité authentique est dans leur synthèse harmonieuse, et non pas dans leur opposition factice. Au livre III (chapitre iv) de son traité Du Pape, Josbi » h dk Maistre a excellemment écrit : C’est l’Eglise seule qui, par la bouche de ses Pontifes, sut établir à la fois, et l’origine divine de la souveraineté, et le droit divin des peuples. Yves de la Briêrb.


POUVOIR PONTIFICAL DANS L’ORDRE TEMPOREL. — L’article comprendra deux sections :

I. Pouvoir temporel du Pape. — II. Pouvoir indirect du Pape sur les choses temporelles.

I
POUVOIR TEMPOREL DU PAPE

(Souveraineté dans l’ordre international)

I. Position de la question. — Le terme de Pouvoir temporel du Pape suggère plus communément à