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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/600

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SAPIENTIAUX (LIVRES)

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lions de Jéréuiie sont composés de la sorte. Les trois sections précédentes (6-8) sont en strophes de différentes mesures.

Enfin la première section (i-ix) a été préposée à tout le recueil en guise d’introduction. En effet, elle contient des invitations générales à l’étude et à la pratique de la sagesse, et si elle descend à des points particuliers, c’est surtout pour détourner les jeunes gens de la femme étrangère (de mauvaise vie). La pensée se déroule dans d’amples et majestueuses périodes, on dirait de grandes strophes d’une dizaine de versets environ, et prend le ton paternel de l’éducation au foyer domestique. Ainsi :

Ecoutez, mes fils, l’instruction d’un père,

et Soyez attentifs, pour apprendre 1 intelligence ;

car je vous donne une bonne doctrine ;

n’abandonnez pas mon enseignement.

Moi aussi j’ai été un fils pour mon père,

un fils tendre et unique auprès de ma mère.

Il m’instruisait et il me disait :

« Que ton cœur retienne mes paroles, 

observe mes préceptes, et tu vivras » etc. (iv, 1-4).

D’après l’opinion jadis commune et aujourd’hui encore préférée par les savants catholiques, l’auteur de cette introduction (i-ix) serait encore Salomon. On s’appuie généralement sur la claire affirmation du premier verset, espèce de titre : Proverbes de Salomon, fils de David roi d’Israt ! , etc. Mais, comme le fait bien ressortir la 2e édition de Crampon, tout le prologue I, 1-7 pourrait bien se rapporter à tout le livre dans son ensemble, attribué en bloc à Salomon parce que Salomon en est le principal auteur, tout comme le Psautier est appelé par le Concile de Trente Psalterium davidicum, parce que David est le plus remarquable et le plus fécond des auteurs de psaumes. Cela n’importerait pas que Salomon soit aussi l’auteur de la section immédiatement suivante (1, 8-ix, 18), de même que les sections 3e et fp, enchâssées entre deux recueils salomoniens, ne sont pas de Salomon. D’autre part, le style de cette première partie est tout à fait différent de celui des recueils salomoniens ; sa langue a de frappantesaccointances avec celle du livre de Job, les longs développements r mire la « femme étrangère », dont nous parlions tout à l’heure, au temps de Salomon auraient été une satire contre ce roi voluptueux (I Rois, xi, 1-8), plutôt que la peinture des mœurs de ce temps là.

Il est donc plus prudent d’abandonner l’origine salomonienne de cette première partie du livre. Mais ceci fait, nous sommes d’autant plus en droit de soutenir, que Salomon est vraiment l’auteur des deux recueils x-xxn 16 et xxv-xxix. Aucune raison décisive n’a pu être opposée ; et d’autre part, l’archaïsme de l » IV.rme poétique, et pai lois de la langue elle-même, joint à ce que raconte le livre sacré des Rois du talent de Salomon (I Rois, v, 10-12), nous offre une base très solide pour affirmer que, dans les deux recueils tout à l’heuie mentionnés, il est parvenu jusqu’à nous une partie notable de ces « trois mille maximes » (hébr. maSml) que « prononça » le plus sage des rois d’Israël. Il est probable que ces maximes furent d’abord transmises oralement et plus lard lenlement recueillies par éerit dans des livres, lin effet le texte lui-même nous dit que la deuxième série des maximes salomoniennes (xxv-xxix) a été recueillie > par les gens d’Ezéehias, roi de Juda (xxv, 1). Comparera ce propos II (’/non., xxix, 30, d’où l’on peut conclure qu’Ezécliias déploya pareille activité litt. raire pur rap|K>rt aux psaumes (livres 2 et 3e, ou collection élohistique du Psautier ; voir vol. III, col. 4^5 s.). On ne pourrait soutenir que dans’l façon de transmission nul élément étranger ne se

soit glissé dans l’œuvre de Salomon, nulle retouche n’en ait changé le texte. Les doublets qu’on remarque dans xxv-xnx par rapport à x-xxu (p ; ir exemple xii. 1 i=xxyiii, 19 ; six, i — xxviii, 6 ; xxw, 3 xxvii, 11), avec leurs variantes parfois notables, sont là pour témoigner le contraire. Mais tout ceci ne nous donne aucun droit de nier, que la plus grande partie des deux recueils soit l’œuvre authentique de Salomon, et par conséquent c’est bien avec raison que tout le livre porte le nom illustre du sage (ils de David.

Deux autres auteurs sont nommés dans le texte même des Proverbes : Agur fils de Jaké (xxx, 1) et un roi Lamuel |xxxi, 1). Il est bien vrai que ces deux personnages, inconnus pur ailleurs, sont déguisés dans la version grecque des Septante et dans la Vulgate. La Septante, prenant ces noms comme des mots ordinaires, traduit xxx, 1 : Il Crains mes paroles, mon fils » ; et xxxi, 1 : « Mes paroles ont été prononcées par Dieu ; oracle d’un roi, que sa mère instruisit ». Saint Jérôme à son tour dans xxx, 1, vit des noms allégoriques, faisant allusion à Salomon, et traduisit :

« Paroles de celui qui assemble (comparer ce qui

sera dit tout à l’heure sur le titre de l’Ecclésiaste), fils de relui qui vomit » (comparer Psaume xi.iv, 2 dans la Vultrat-e). Beaucoup de modernes, au contraire, considèrent comme un nom propre le mot massa, traduit par Crampon

« sentence » ; ce serait la patrie de ces deux sages.

En effet Massa est nommée dans la Genèse xxv, 14 parmi les villes habitées par des Ismaélites, descendants d’Abraham, situées au delà du Jourdain. D’après cette opinion, il faudrait traduire xxx, 1 « Paroles d’Azur fils de JaUé, de.Massa t on « le niasséen » ; et XXXI, 1 « Paroles de Lamuel. roi de Mas-a ». Si cela était certain, il faudrait dire, ou que ces deux sages appartenaient à la population juive répandue dans les régions orientales, ou qu’ils étaient convertis au culte du vrai Dieu, du Dieu d’Israël. Agur reconnaît expressément Yaliweh pour son Dieu (xxx, 9). En tout cas, l’inspiration de leurs petits poèmes est sauvegardée, même s’ils n’appartenaient pas par le sang à la descendance de Jacob. On en conclurait que l’action du Saint-Esprit s’étendait plus loin que lu loi mosaïque, comme nous l’avons déjà vu dans Job.

4. L’Ecclésiaste est sans doute le plus extraordinaire des livres de l’Ancien Testament. Sa langue n’est pas l’hébreu classique, l’hébreu des autres livres ; c’est l’hébreu plus récent, l’hébreu presque de la Miehna ou code rabbinique du ir° siècle après J. C. Les idées, les doctrines de l’Ecclésiaste ont souvent l’apparence de celles qu’on s’attendrait le moins à trouver dans un livre inspiré par Dieu. Son nom lui-même reste encore une énigme pour l’exégèse scientifique. Ecclésiaste est la traduction grecque étymologique du nom hébreu Qohéleth, sous lequel se cache l’auteur (i, 2, 12 ; xii, 8-10). Qohéleth, de la racine r/ « /i « / = coiivoquer une assemblée (en grec ccclrsia ) signifierait « orateur dans nue assemblée ». A cause de ee nom d’Ec. !. si as te, on a^ ; ru longtemps que notre petit livre (il ne compte que douze chapitres, en tout 222 versets) n’est qu’un sermon adressé au peuple par Salomon. Mais il n’a rien du ton et du style oratoire, et il suffirait de comparer l’Ecclésiaste avec le Deutéronome (la loi exposée en de vrais sermons), pour comprendre toute la distance qui sépare l’entretien philosophique de la pièce oratoire. Car l’Ecclésinste, en somme, est bel et bien un entretien philosophique, tel que la diatribe (causeï le) de certaines écoles grecques. OU, si l’on a eut, une composition libre, comparable aux Pensées, que connaît aussi la littérature moderne. De l’entretien, il a l’allure abandonnée.’les va-et-vient, les alternances de pour et contre ; des pensées il a souvent le manque de liaison et de suite. C’est ce qui fait, soit la difficulté d’en donner une analyse précise et ordonnée, soit la source de tant d’objections à l’unité et à la doctrine de ce curieux livret.