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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/758

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STIGMATES DE SAINT FRANÇOIS

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d’origine nerveuse (C. 1 !. Société de Biologie, Paris, 1885).

Quant aux hémorragies internes, hémoptysies, hématémèses ou vomissements de sang, qu’on rattachait naguère si complaisamment à l’hystérie, on a remarqué que les conclusions, sur ce point, dépassent les prémisses, qui sont nulles. Il n’y a, en effet, pas un seul exemple de lésion interne pouvant être imputé à la suggestion pure : or, sans lésion, pas d’hémorragie, car l’hémorragie ne peut avoir lieu si l’épiderme ou si l’épithélium est sain, pour la raison très suifisante que l’épiderme et les épithéliums sont entièrement dépourvus de vaisseaux. Une se produit donc de crachement, de vomissement de sang que si l’épithélium des muqueuses est entamé, et l’opinion des psychiatres les plus autorisés est que rien ne permet de rattacher ces hémorragies à l’hystérie. « On est actuellement plus difficile sur leur diagnostic », disait déjà en 1909 le professeur Jankt (les Nécroses) ; deux ans avant, Tkrrien avait conclu au congrès de Genève-Lausanne qu’on n’en a jamais observé sous l’influence de la suggestion seule (fiulletin Médical, 1907, p. ^31, col. 3, 2* semestre) ; Mbndici-Bono, s’appuyant sur une statistique de plus de seize mille cas, émanant de dermatologistes célèbres, ne trouvait pas un cas d’hémorragie d’origine nerveuse (Hartbnberg, V Hystérie et les Hystériques, pp. 188189) ; et Hartenberg, commentant ce résultat (ibidem, pp. 80-81), constatait qu’il n’avait « jamais provoqué de lésions par suggestion chez des sujets hypnotisés ». Vingt ans avant, Bbaunis n’avait-il pas eu raison de confesser que « la congestion cutanée représente jusqu’à présent le maximum d’effet qui ait été obtenu par la suggestion (Somnambulisme provoqué, ch. v, p. 72) » ? On ne s’étonnera pas que, depuis lors, on n’ait rien enregistré, ni même tenté, de nouveau en ce genre.

Vu l’impossibilité detrouver réalisée une hémorragie nerveuse, ceux qui veulent à tout prix rencontrer une analogie naturelle avec les stigmates, ont cherché des cas de sueur de sang. Si l’on met à part les commentaires qui colportent des cas anciens (Grisollb, Traité élém. de patliol. interne, t. I, p. 641 ; Gkndrin, article Hématidrose du Traité de méd. pratique ; Chomhi, , article Hémorragie du Dict. des se. médicales ; BeaOms, p. 83, op. cit.), l’on ne trouve pas, à notre connaissance, d’observation médicale détaillée d’un fait analogue à ceux qu’ont publiés Magnus Hùss et Parrot, en 1867 et 185g. (Arch. ghi. de méd., 1 867, p. 165et suiv. — Gazette hebdomadaire, iS5q, p. 633, 044, 678, 713, 743 : cinq numéros).

Magnus Hùss et Parrot ont vu des sueurs de sang ; récapitulant eux-mêmes les cas enregistrés avant leur temps par la science, ils ont dû remonter jusqu’à Boerhæve (1765)et à Hoffmann (Genève, 1798). Et qu’ont-ils constaté sur les échantillons qui leur ont été soumis et dont le premier caractère est assurément d’être rares ? Ils ont vu un épiderme absolument intact : « Impossible, écrit Parrot, de distinguer, après avoir abslergé le sang, les orifices d’où il provenait ; la peau n’est nullement tuméfiée. » (P. 646). Et Magnus Hùss : « Le sang filtre autour de la racine des cheveux, forme autour de chaque cheveu un point rouge, puis une goutte, qui est bientôt augmentée d’une seconde goutte qui la suit de près.. Quand on examine à la loupe la surface saignante, on ne voit pas de traces d’excoriation de la peau, maison voit très positivement le sang filtrer autour du cheveu. Si on arrache le cheveu, on ne trouve pas que la racine en soit altérée. » (P..69).

On trouve aussi, dans d’autres cas naturels ou morbides, des faits de transsudation du sérum sanguin sans globules (œdème), ou de translation des globules sans sérum (diapédèse) ; mais, outre que cela n’a pas lieu à travers l’épiderme, on ne trouve vraiment pas dans ces faits la moindre analogie avec les stigmatisations.

Il s’en faut donc de beaucoup que l’imagination créatrice, cette invention de M aury adoptée par Ribot, ait provoqué le moindre stigmate. Il ne suffit pas, avec l’illustre Bkchtkrbw, d’alhrmer que « par l’auto-suggestion s’expliquent les divers stigmates et les hémorragies périodiques des mêmes régions du corps que celles où le sang coula chez le Christ en croix » : qu’il se suggère ces stigmates avec succès, et je le croirai sur parole I — Il ne suffit pas d’écrire, avec le non moins illustre Lombroso, qu’  « après saint François les stigmates abondent, sans doute par imitation ou émulation » : qu’on me montre un imitateur, un émule, annonçant le résultat et le réalisant ! (Cf. Bechtbriîw, La suggestion et son rôle dans la vie social/’, p. yo, trad. de Kéraval. — Lombhoso. Hypnotisme et Spiritisme, p. 121.)

Tant qu’on n’a pas fait une division entre deux nombres, ils ne sont pas dans le rapport de dividende à diviseur, ils sont deux nombres, voilà tout : l’opération établit le rapport. Tant qu’on n’a pas manipulé une cause pour lui faire produire son effet, ce sont deux faits, ce ne sont pas la cause d’un effet et l’effet d’une cause. Et tout ce qu’on présumera d’eux ne sera que verba et voces ; l’acte établira la causalité.

g 2. — Les stigmates naturels sont-ils seulement possibles ?

Mais les rationalistes, acharnés à trouver une analogie avec les stigmates, se conduisent parfois en vulgaires dialecticiens. A défaut du fait introuvable, ils cherchent à pénétrer les conditions de sa virtualité. Ne sommes-nous pas endroit, sur ce terrain, de leur présenter notre avis ?

Ne disons donc plus : « Qu’est-ce qu’une imagination produisant des stigmates ? » Ne le disons plus, puisque cette imagination, toute créatrice qu’elle est, n’a pas encore agi en ce sens. Disons seulement :

« Que serait-ce ? Que serait-ce qu’une imagination

produisant des stigmates ? » Représentons-nous ce mécanisme en action, puisqu’on ne nous le présente pas. Demandons à la raison de nous dire si l’hypothèse est plausible, puisque l’expérience est muette sur la réalité.

Mais la raison peut-elle suffire à une pareille tâche ? Le D r Terrien (nous l’avons vu tout à l’heure) déclare n’avoir pas observé de stigmates naturels, mais il ne voit pas pourquoi l’on n’en observerait pas. Un membre non moins connu du corps médical, et qui a laissé en outre dans la science la réputation d’un croyant, jugeait imprudent de déborder ici le champ de l’expérience : « Si le système nerveux, écrivait Furrand, est capable de provoquer dans les tissus et à leur surface des altérations aussi multiples, on conçoit quelle réserve il convient de mettre dans cette affirmation : qu’il lui serait impossible de produire des stigmates. » (Revue du Monde invisible, août 1902).

Cette réserve nous paraît exagérée : voici pourquoi. Le concept de stigmate naturel n’exige pas seulement la représentation d’un mécanisme vasomoteur tel que nous l’avons décrit plus haut ; il n’est complet qu’avec la notion d’un trouble tropliique évoluant concurremment avec le trouble vasomoteur. En effet, le sang peut bien s’épancher sous les tégument ?, théoriquement, à la faveur d’un phé-