Page:Adolphe de Coston - Étymologies des noms de lieu de la Drôme.djvu/84

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(1766). M. Delacroix (p. 641) dit que le village est adossé à un rocher qui a la forme d’un vaisseau renversé, ce qui a déterminé le nom de Vallis Navigium, vallée du navire. Vaulnaveys, près de Vizille, est appelé aussi Vallis Navigii en 1267, parce que la vallée, dit-on, a la forme d’un vaisseau : d’autres auteurs pensent que Vaulnaveys est une altération de vallis nova, vallée nouvelle, et que ce nom lui a été donné à l’époque où la Romanche a changé de lit en pratiquant une ouverture à la barre qui la séparait du bassin du Drac. Tout cela me paraît peu vraisemblable.

La seconde partie du nom de Vaunaveys ne peut pas être expliquée symboliquement, et doit pouvoir s’appliquer aux localités qui portent un nom analogue ; mais ici commence la difficulté, parce que ce radical a diverses significations. En Dauphiné et dans les pays voisins il paraît avoir eu le sens de hauteur, montagne, comme dans les noms suivants : le pic de Naves, près de Sassenage ; le serre de Navon, qui domine le château de Belleau, au nord de Donzères ; Naves, de navis en l., sur une montagne près des Vans (Ardèche) ; Navas, Naves, Navon, assez communs dans les Cevennes ; le Navech ; Navette (Hautes-Alpes), etc. Vaunaveys serait alors synonyme de Valmont ou de Montval ; mais nave est-il emprunté à une racine dont je n’ai pas rencontré de trace en celt., et qu’on retrouve dans nap et nab, hauteur, pic, en scand. et en ang. sax.[1], ou vient-il par métaphore du radical qui a formé le l. nives, neige (neif dans le XIe siècle, neve en it.), ou nebula, nuage (naba en s. c. t.), ces localités étant plus souvent que les autres couvertes de neige ou voilées par les brouillards ? Je ne sais.

Dans le nord de la France, notamment pour Naves (Nord), Navois (Doubs), ce mot doit être traduit par prairie aquatique, marais, lieu bas, nave et navie dans l’ancien idiôme du pays[2]. C’est une variante de la Noue et des Noues, si communes dans

  1. Morris, The etymology of local names, p. 51.
  2. Mannier, Études étymologiques, p. 296.