Page:Agassiz - Études sur les glaciers, 1840.djvu/323

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plète des terrains d’attérissement, le remplissage des lacs et de toutes les inégalités existant alors ou formées par le soulèvement des Alpes. Cette nappe de glace a dû s’étendre aussi loin que les blocs erratiques. La nature et l’origine de ces blocs deviennent même une nouvelle preuve de ce fait si long-temps ignoré, et maintenant si bien prouvé, savoir, que les Alpes sont les plus jeunes des montagnes de l’Europe, puisque ces blocs provenant des fractures qu’elles ont éprouvées, se trouvent toujours gisant par dessus les terrains d’attérissement et jamais au dessous.

L’apparition de ces grandes nappes de glace a dû entraîner à sa suite l’anéantissement de toute vie organique à la surface de la terre. Le sol de l’Europe, orné naguère d’une végétation tropicale et habité par des troupes de grands éléphans, d’énormes hippopotames et de gigantesques carnassiers, s’est trouvé enseveli subitement sous un vaste manteau de glace recouvrant indifféremment les plaines, les lacs, les mers et les plateaux. Au mouvement d’une puissante création succéda le silence de la mort. Les sources tarirent, les fleuves cessèrent de couler, et les rayons du soleil, en se levant sur cette plage glacée (si toutefois ils arrivaient jusqu’à elle), n’y étaient salués que par les sifflemens des vents du Nord et par le tonnerre des crevasses qui s’ouvraient à la surface de ce vaste océan de glace.

Mais cet état de chose eut sa fin, une réaction s’o-