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VIII.

Trop ne me puis de bonne amour loer
Qui m’a donné m’amour et mon désir,
Et qui m’esprent si fort que désirer,
Ne porroie n’autre amer ni chiérir,
Fors le bon, le bel, le gay(21),
Que j’aim de cuer et toudis ameray
Si fermement, sans muer ne changier,
Qu’autre de lî jamais amer ne quier.

Et je voy bien qu’il m’aime sans fausser,
Et que tout miens est si, sans retoillir,
Qu’il ne porroit autre que mi amer,
Et que ne prent en autre amour plaisir.

Et certainement bien say
Qu’une autre amoit, quant premier l’enamay (22) :
Or ay son cuer si franc et si entier
Qu’autre de li jamais amer ne quier.

Or veuille amour qu’en jeunesse durer
Puist ceste amour, toudis sans en vieillir,
Et sans morir : si serons sans flner (23)
En paradis d’amour ; car sans mentir

Là n’a tristesse, n’esmay
Ne rien qui puist tollir joie à cuer vray.
C’est un droit fluvs de douceur qu’ay si cbier,
Qu’autre de li jamais amer ne quier^