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DE LA SECONDE ÉDITION

n’est plus aujourd’hui le même qu’il y a dix années. Ce n’est plus aux personnes qui ont fait ou qui ont subi la République que mon livre s’adresse. Je considère qu’il leur serait inutile ou fâcheux. À de rares exceptions près, cette génération est fatiguée ; elle a visiblement besoin de repos. Quelques-uns, les plus stoïques, le demandent à la solitude ; d’autres l’ont su trouver au sein de la famille ; la science, les arts, l’industrie en ont distrait ou consolé plusieurs. Inviter des âmes tristement résignées, bienfaisantes à leur manière et dont j’honore le renoncement, à étudier avec moi les causes de nos désastres passés, ou les moyens de préparer un avenir meilleur, ce serait, sans raison, y ramener le trouble : tel n’est pas mon dessein. C’est à une autre classe de lecteurs que je voudrais offrir mon livre, dans l’espoir qu’il lui pourrait être de quelque utilité.

Depuis la chute de la République, une génération nouvelle est venue. Entrée à peine dans la vie publique, appelée à son tour à prendre part aux affaires, à voter dans les comices, à siéger dans les assemblées, à exercer les professions libérales et les droits civiques, cette génération, un peu déconcertée par la fréquence et la contradiction de nos changements politiques, se demande, à cette heure, ce que l’on doit entendre chez nous par le droit et la liberté. Dans le brusque passage de la royauté à la république, de la république à l’em-