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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

dèles ont seules de ces armes perfides et empoisonnées.

« Le ministère veut mettre la minorité en jugement, dit M. Duvergier de Hauranne, en faisant allusion à la phrase sur les passions aveugles et ennemies, mais qu’importe ! La majorité ministérielle est libre de faire ce qui lui plaira ; la minorité ne s’en préoccupe plus. Ce ne sera qu’une pièce de plus dans le grand procès qui se débat au sein de la Chambre, mais dont le juge est ailleurs. » Selon M. Duvergier de Hauranne, la loi ne donne aucun moyen, aucun prétexte au gouvernement de s’opposer à une manifestation de cette nature. Si l’on osait le tenter, il s’associerait sans hésiter à la résistance.

Expliquant ensuite l’omission du toast au roi dans plusieurs banquets « Si c’est un avertissement, dit-il, il faut s’en prendre au cabinet, qui fait du souverain un chef de parti, dénature le gouvernement représentatif, abaisse et corrompt les mœurs, travaille à faire contre l’indépendance des peuples une nouvelle sainte alliance. Vous nous accusez d’être mus par des passions aveugles et ennemies, s’écrie l’orateur ; nous, nous vous accusons de fonder sur les passions basses et cupides tout l’espoir de votre domination. Vous nous accusez de troubler, d’agiter le pays dans un misérable intérêt d’ambition ou de vanité ; nous, nous vous accusons de le corrompre pour l’asservir. » Et il termine par un défi : « Comme M. Guizot l’a dit si souvent, au delà, au-dessus de la Chambre, il y a le pays, près duquel la minorité est toujours en droit de se pourvoir. C’est ce que nous avons fait et c’est ce que nous continuons à faire. Que cela soit donc bien compris, bien entendu ; nous ne venons pas ici plaider devant la majorité contre le ministère, nous venons plaider devant le pays contre le ministère et contre la majorité. »

Le radicalisme, perpétuellement accusé dans la presse ministérielle de travailler à détruire la famille et la propriété, et de vouloir établir en Europe le règne de la terreur, fut brillamment défendu à la tribune par M. Marie.