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CHAPITRE IX

Seconde journée.


La nuit fut muette ; le pouvoir crut qu’elle était calme. À tout événement, il prenait ses mesures. Des renforts de troupes arrivaient par les chemins de fer. Des canons amenés de Vincennes étaient mis en batterie sur la place du Carrousel, sur la place de la Concorde, aux abords des portes Saint-Denis et Saint-Martin, sur les quais, à l’Hôtel de Ville. Le ministère dressait une longue liste d’arrestations, sur laquelle figuraient les noms des principaux rédacteurs de la presse démocratique, les chefs des sociétés secrètes, les hommes les plus influents du parti radical[1]. Il régnait à cet égard entre le roi et son cabinet une entente parfaite.

Cependant la troupe, qui a bivouaqué à la pluie, les pieds dans la boue, l’esprit perplexe et le corps transi, aperçoit, aux premières lueurs du jour, une multitude gaillarde et résolue, qui afflue par les rues Saint-Martin, Rambuteau, Saint-Merry, du Temple, Saint-Denis, où, sur beaucoup de points, elle a élevé des barricades. On s’observe quelques instants, puis les ouvriers engagent des escarmouches ; des feux de tirailleurs leur répondent. Ré-

  1. Cette liste de 150 noms environ a été trouvée, le 24 février, sur table du préfet de police, par un insurgé qui y figurait.