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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

autant qu’elle travaillé à sa ruine. Immorale avec Louis XIV, scandaleuse avec Louis XV, despotique avec Napoléon, inintelligente jusqu’en 1830, astucieuse, pour ne rien dire de plus, jusqu’à 1848, elle a vu successivement décroître le nombre et l’énergie de ceux qui la croyaient encore nécessaire. Elle n’a plus aujourd’hui de partisans. Charles X avait encore des amis personnels et des serviteurs dévoués. De nobles cœurs ont porté son deuil ; son héritier a pu pendant un temps trouver des soldats. Louis-Philippe n’a été reconduit que jusqu’à la porte de sa demeure. On a protégé sa vie, mais pas sa couronne, et on l’a laissé se sauver sans lui faire l’honneur de le croire dangereux. Jamais trône n’a croulé d’une façon plus humiliante. C’est que ce trône n’était plus un trône. Il n’y aura pas de meilleurs et de plus sincères républicains que les catholiques français. Parmi les principes sociaux qui viennent de triompher et qui vont se formuler en institutions, quels sont ceux que l’Église repousse ? Quels sont ceux que sa voix n’ait pas fait retentir depuis dix-huit siècles à l’oreille des peuples et des rois ? Nous n’en voyons aucun. »

Pendant deux mois le clergé de Paris bénit les arbres de la liberté, les comparant à l’arbre de la croix, rappelant avec complaisance que la cause du prêtre est la cause du peuple et que Jésus-Christ a le premier donné au monde la formule républicaine : Liberté, Égalité, Fraternité, le plus souvent, les peupliers symboliques étaient pris dans les beaux jardins des congrégations, et les religieuses les décoraient elles-mêmes de guirlandes, de nœuds, de banderoles. Elles offraient des lits pour les invalides du travail, adoptaient les filles des combattants morts pour la patrie. Le concours du clergé régulier et séculier fut unanime. Il ne s’éleva pas dans son sein une seule voix pour regretter la royauté déchue.

La magistrature n’opposa, non plus que le clergé, aucune résistance à l’entrainement général. La cour de cassation, la cour d’appel, la cour des comptes, le tribunal de